•  

    C.R. du 9 Avril 2022

    « Peut-on s’inspirer de la sagesse des plantes ? »  

     

     

     

    La séance s’est tenue au Café Marina de 16 h 30 à 18 h 45. On a compté un total de 16 participants durant tout ou partie de la réunion.

     

    Le présent compte rendu essaie de regrouper les interventions et les réponses de façon thématique et non chronologique.

     

     Considérations générales

     

    Plusieurs intervenants critiquent le titre de l’exposé, le trouvant hors-sujet et trompeur : d’abord comment définir ce qu’est la sagesse ? Il est plutôt « accrocheur », mais se justifie du fait qu’il est souvent utilisé dans la littérature consacrée à ce sujet. Cette sagesse réside-t-elle dans le fait que, alors que l’être humain veut dominer, la plante vise surtout à s’adapter à son environnement, qu’elle tend vers l’équilibre ? Ne devrait-on pas parler d’organisation plutôt que de sagesse ? Mais là, au contraire, c’est très réducteur.

     

    Ce texte aurait aussi une connotation très « politique » dans la mesure où il met indirectement en cause tous les agissements humains.

     

     Spécificités des plantes

     

    Il est affirmé que les plantes ne sont ni inférieures, ni supérieures aux représentants du règne animal. Elles sont différentes, elles sont autres. Pourtant elles partagent avec les animaux des propriétés que les techniques modernes d’analyse ont permis de découvrir, du moins chez certaines d’entre elles : le mouvement (mesuré grâce à la photographie), la mémoire (exemple de la sensitive qui se souvient que la chute de gouttes d’eau n’est pas une agression), le langage (les échanges ne sont pas verbaux, mais chimiques ; ils peuvent être visuels dans les 2 cas), la proprioception (la plante ou l’arbre réagit aux informations locales – agression de parasite par exemple), la gravité (les plantes tendent à pousser verticalement, et à se redresser si on les incline, ce qui n’est pas la solution la plus économique en énergie), la vision pour certaines (capacité de certaines lianes tropicales à prendre la couleur de leur support), l’acoustique (les plantes perçoivent la propagation des sons, peuvent parfois en émettre), etc..

     

    Par contre il y a de grandes différences animaux / végétaux, résumés ci-après.

     

    Forme corporelle : déterminée / indéterminée ; existence : mortelle / potentiellement immortelle ; intériorisés / extériorisés ; centralisés / décentralisés ; compétition / entraide ; contraintes / liberté ; organisation pyramidale / organisation en réseaux ; géocentrisme / cosmocentrisme, etc. Plusieurs participants reconnaissent la capacité de nombreuses plantes à se reproduire de multiples façons y compris de façon asexuée (bouturage p. ex.) et une ingéniosité certaine.

     

     Les plantes sont donc autres en ce qu’elles proviennent d’une organisation différente des mêmes matériaux constitutifs du vivant, résultants de la chimie du carbone. On pourrait donc imaginer d’autres formes de vie à partir des mêmes ingrédients et, pourquoi pas, du silicium, élément tétravalent comme le carbone et dont les propriétés chimiques sont voisines. Les auteurs de SF ne s’en privent pas.

     

     Performances des plantes

     

    Ceux qui estiment que le statut des plantes est inférieur au nôtre font valoir que, poussant là où le hasard a posé leurs graines, elles ne font que tirer parti au mieux de la situation pour survivre et se développer. Elles seraient au plus bas niveau d’une pyramide de Maslow. Comme il a été précisé ci-dessus c’est là un préjugé anthropocentré. D’autant plus que la réalité est autre : les plantes, malgré leur apparente immobilité, développent des stratégies pour croître et se multiplier : surabondance de cellules reproductrices disséminées (exemple du pollen des pins maritimes), transport des semences confiées à des vecteurs animaux involontaires (bardane, aigremoine), projections mécaniques (concombre d’âne), etc. Un cas assez spectaculaire est celui d’un petit géranium sauvage très courant (géranium bec de grue) dont la graine est d’abord catapultée, puis se déplace et vient forer le sol pour s’y enfoncer à l’endroit le plus favorable.

     

     Les plantes ne seraient pas aussi performantes qu’on l’affirme : le rendement énergétique de la photosynthèse atteint à peine 2%, ce qui est très inférieur à celui des cellules photoélectriques. C’est très vrai, encore faut-il moduler cette affirmation en tenant compte de ce que les plantes ne recouvrent pas la totalité de la surface illuminée. Mais ce n’est pas le seul critère d’appréciation de l’efficacité de ce processus : ainsi cette énergie permet la séparation des atomes de H, de O (photodissociation de l’eau), de C et la synthèse de matières organiques sans autre apport énergétique. Les végétaux remplissent « gratuitement » d’autres fonctions qui nécessiteraient des dépenses importantes d’énergie comme la climatisation. Mais  est posée la question du ravalement des murs qui auraient été végétalisés.

     

     Questions d’éthique 

     

    Est-il possible de tirer des considérations éthiques ? La Nature n’a rien d’angélique. Pour certains l’éthique est indissociable de l’action. En fait,  pour la plupart des auteurs l’éthique est une spécificité humaine, contrepartie de notre perte d’instinct salvateur : nous ne savons pas spontanément distinguer le bon du mauvais, le bien du mal. Les autres êtres vivants si : comment se fait-il que les oiseaux se régalent de baies de sorbier alors qu’ils semblent dédaigner les fruits de pyracantha ou de troène ?

     

     Même si la coopération, la synergie dominent, la compétition existe aussi. Est cité le cas du noyer qui empêche la pousse de nombreuses autres plantes sous son ombre, par production de nucine (ou juglone). Plus curieusement une plante comme l’alliaire de nos forêts ne dérange pas ses voisines alors qu’invasive aux USA, elle détruit les champignons du sol.

     

    La question des plantes invasives est posée. Il faut savoir que la plupart des plantes que nous connaissons sont originaires d’autres pays, voire d’autres continents, introduites naturellement, volontairement (abricotiers, tomates, melons, etc.) ou accidentellement. Cette prolifération peut poser des problèmes de santé (ambroisie et allergies), de compétition avec d’autres végétaux (jussie, érable à feuille de frêne).

     

    Plus généralement, s’il est vrai que les végétaux, individuellement ne bougent pas, rivés au sol, la progression de leurs espèces est une réalité. Les pins « se déplacent » plus vite que les chênes verts (5 km/an contre 700 m), ils sont donc moins sensibles aux conséquences éventuelles du réchauffement climatique.

     

    Sont également évoquées les plantes toxiques pour les humains (digitale, cigüe). Même des plantes bien sympathiques comme les fraisiers des bois peuvent s’avérer dangereux si l’on consomme des fruits arrosés par l’urine d’un renard (risque de trichinose et surtout d’échinococcose mortelle). On cite également le risque des piqûres de tiques en forêt (maladie de Lyme).

     

     Les relations homme-végétal

     

    Réminiscences ataviques ? Trois cents mille ans après la sortie des bois de leurs ancêtres, les forêts suscitent chez les humains un mélange de crainte et de bien-être. Les développements des instruments d’analyse moderne (IRM par exemple) montrent que l’ambiance arborée, même fictive sous forme d’images, leur est bénéfique (certains parlent de vitamine G, G comme green) : on observe une baisse de l’agressivité, un ralentissement du pouls, un frein à l’hyperactivité… D’autre part les arbres exhalent des molécules naturelles à vertus thérapeutiques (terpènes) mais aussi produisent de l’ozone en excès (forêts de pins). Il ne faudrait pourtant pas fantasmer les bienfaits de la nature, y trouver des auras invisibles, des sylphes protecteurs, comme tendent à nous le faire croire de nombreux charlatans prenant place sur un créneau médiatique de plus en plus porteur.

     

    Les arbres sont également investis d’un pouvoir quasi magique : baobabs en Afrique, auprès desquels sont enterrés les morts, figuier des pagodes aux Indes.

     

    On pourrait émettre l’hypothèse que l’être humain, enfermé dans son logement, sorte de tombe pour être vivant où tout est stable et silencieux, recherche le son et le mouvement qu’il avait dans la forêt de ses ancêtres en allumant radio et télévision sans toujours écouter et regarder.

     

    Enfin, s’il est vrai qu’une tonne de bois absorbe quelques 1800 kg de carbone, la plantation d’arbres et le stockage du bois ainsi produit sont loin de compenser les rejets annuels des êtres humains : reboiser ne suffit pas.

     

    D’un autre côté qu’apporte l’homme au monde végétal ? Les avis sont partagés. Pour certains il serait responsable de la destruction des forêts, de la latérisation des sols, de l’avancée des déserts. Pour d’autres le végétal survivra aux humains : il surmonte les conséquences des feux de forêts, aux explosions nucléaires.La construction de la Transamazonienne est sans arrêt compromise par la vigueur de la végétation. En Afrique, la culture itinérante sur brulis était très « écologique » lorsqu’elle était bien menée. Avec la colonisation et l’appropriation privée des terres qui en est résulté, une autre agriculture a vu le jour, bien moins respectueuse de pérennité de la fertilité des sols et des besoins des populations (cultures d’exportation : arachide, coton, café, cacao, palmier à huile).

     

     Incidente : la question de l’alimentation mondiale

     

    La guerre qui se déroule actuellement en Ukraine pourrait avoir des conséquences terribles sur l’alimentation des populations d’Afrique et du Moyen-Orient : des famines et des déplacements massifs de population. Car Russie, Ukraine sont les greniers à blé, à maïs et à tournesol pour une grande partie du monde. On mesure à cette occasion le danger que fait courir à l’humanité le choix d’un modèle d’alimentation mondialisé, reposant sur un nombre d’aliments bien plus limité que dans le passé (blé tendre, maïs, riz, volaille, viande bovine…). Le moindre incident (guerre, épizootie, épiphytie) peut conduire à la catastrophe. Là encore grande est la responsabilité du modèle occidental de production et de consommation (merci McDo !). Pour des raisons agronomiques (sommes des températures, durées d’ensoleillement) blé tendre et maïs ne peuvent être cultivés que dans des zones géographiques limitées. On n’a pas suffisamment développé les techniques de promotion et d’utilisation des plantes autochtones (mil, manioc, igname…).

     

     Ebauche de conclusion

     

    Après ce tour d’horizon, la question de ce que peut nous apporter ce réexamen du statut des végétaux face aux enjeux scientifiques, techniques, environnementaux et éthiques a été à peine abordée.

     

    Ont été évoqués : la permaculture, méthode et philosophie qui viserait  à concevoir des éco systèmes humains éthiques, durables et résilients, en s'inspirant de la nature ; le concept de « Jardin planétaire »*. L’intérêt de l’organisation sociale et politique en réseaux a été relevé (exemple d’internet). Le stockage pérenne à froid sur ADN d’une information de plus en plus considérable est sans doute une voie d’avenir, mais on se heurte aujourd’hui à un problème de rapidité d’écriture et de lecture….

     

    Beaucoup restera donc à débattre sur ce sujet. Cette conclusion n’en est donc pas une.

     

     

     

    Pierre Marsal 12/04/2022

     

     

     

    * http://www7.inra.fr/dpenv//grousc38.htm 

     

     

     


    10 commentaires
  •  

    Pierre Marsal 03/04/2022

     

     Pour lire le C.R. du débat

     

     Pour lire le texte sur le site avec statistique des pages lues

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


    1 commentaire
  •  

    Compte-rendu personnel du débat du 19 mars 2022.                

     

    L’Histoire se répète-t-elle, et si oui, que peut-on en tirer ?

     

    Nous étions un dizaine de participants.

     

    Nous avons discuté des cycles de Kondratiev (voir le texte d’introduction), puis nous avons beaucoup parlé de notre démocratie, de justice sociale, qui va élire son président 4 semaines après le débat, et de la guerre Ukraine Russie, le sujet exposé dans le texte n’avait pas inclus les guerres, rappelé en préambule.

     

    Les cycles de Kondratiev.

     

    Leur pertinence a été d’entrée mise en doute : on n’a pas trace, dans ces cycles des perturbations dues aux deux guerres mondiales, qui ont pourtant été des évènements majeurs pour les économies ; cela pourrait s’expliquer si Kondratiev était un états unien, mais non, c’était un conseiller de Lénine. Selon le « Nobel » de l’économie  Joseph E. Stiglitz , le terme de cycle suggère une certaine régularité qui n’existe pas dans la réalité.

     

    Pour un participant, on ne peut pas du tout prévoir l’avenir (et pourtant les cartomanciennes le font !). Les Humains ne sont pas de la matière inerte et leurs réactions sont difficilement prévisibles, et, nous venons de l’éprouver, les virus aussi !  La seule chose que nous puissions faire, c’est extrapoler : si rien ne change, alors le indicateurs de l’économie auront varié autant dans les 5 prochaines années que dans les cinq dernières. On peut aussi éviter ce qu’il ne faut pas faire, ne pas recommencer les mêmes erreurs que par le passé. Mais, à part certaines personnes peu présentes sur les médias, qui avait prévu ces actes criminels en Ukraine ?

     

    D’autre part, l’Histoire ne se résume pas à l’économie : il faudrait aussi considérer les progrès (positifs ou négatifs) dans ta technique (révolution industrielle) et pas seulement renversement des autocrates, dans les arts, dans les sports, dans la spiritualité etc..,

     

    L’état de notre démocratie.

     

    Notre démocratie serait malade : seulement 49% des personnes se sentent en démocratie. Il faut dire aussi que 7% des personnes croient encore que la Terre est plate. Le risque d’une révolte n’est pas négligeable, et pourrait par exemple se concrétiser après les élections législatives de Juin si les partis ne sont pas équitablement représentés. Et les débats politiques seraient de plus en plus agressifs.

     

    Pour certains, « les gens » ne sont pas entendus, et c’est pourquoi on assiste à des protestations qui peuvent tourner à la  révolte. Oui, mais la si « les gens » veulent qu’on les écoute, qu’ils fassent  le premier pas en s’inscrivant dans des partis politiques ou dans des associations, et participent pleinement à la vie de la cité, souvent moins agréable que la tranquillité ; cela est valable pour toutes les institutions, y compris l’Eglise catholique. Les gilets jaunes par exemple, refusaient tout débouché politique à leurs actions, à part les déprédations (certains parmi nous ne les en pensent pas responsables : les éblacks blocss sont venus  dénaturer le mouvement des gilets jaunes et engendré de la violence y compris au sein des gilets jaunes).

     

    Une phrase de La Boétie a été citée : « ce sont les esclaves qui créent le despote et non le contraire ».

     

    A ce égard, un participant a parlé du plaisir que l’on peut éprouver en travaillant à une œuvre commune, qu’on voit naître puis prospérer, chacun ayant la parole et écoutant aussi les autres,.

     

    L’actualité brûlante (guerre en Ukraine) a été analysée. Pouvait-on la prévoir ? Certaines personnes, peu connues l’avaient prévue (dont Philippe Fabry qui s’occupe d’historionomie et l’avait annoncé pour 2019),  mais les cercles politiques et diplomatiques non,  en tout cas en Europe..  Le parallèle avec l’Anschluss de 1938 aurait pu fournir un précédant, à ceci près que la majorité des Autrichiens ont accueilli Hitler les bras ouverts.

     

    La pyramide de Maslow a été citée : peut on s’intéresser à la vie de la cité quand on n’a pas ce qu’il faut pour manger et dormir ?

     

    Il y aurait de quoi être pessimiste sur l’avenir de l’humanité : chacun veut sa part de l’œuvre commune, du gâteau, mais certains veulent avoir tout le gâteau, sans regarder si tout le monde est équitablement servi, ni si sa consommation est une catastrophe pour la planète ! De ce point de vue, nous devons tous faire un « examen de conscience ».

     

    De ce point de vue on a parlé fiscalité, la solution d’augmenter les tranches  d’imposition a été proposée pour réduire les inégalités riches / pauvres. Ces dernières années, les impôts sur les héritages ont beaucoup baissé, et notre société deviendrait une société de rentiers, ce qu’elle était au 19ème siècle ; cela n’est pas très dynamique, et de plus est injuste. Mais, chose curieuse, les classes défavorisées se montrent contre la taxation de l’héritage( !!!???). De toute façon, nous ne sommes qu’au début de la crise et il faudra certainement un rééquilibrage de la fiscalité au profit des plus fragiles.

     

    Il a aussi été remarqué que le progrès technique génère de graves inégalités, en ce que toutes les personnes ne sont pas capables de suivre. Et de plus, il est détourné par les Humains pour faire la guerre (par exemple, il y aurait maintenant des missiles indétectables par les radars).

     

    A la question posée en fin du texte « Que demande le peuple ? » il a été mentionné au cours du débat : la Paix, la démocratie, de la justice sociale, du dialogue, les gens veulent être écoutés, mais il faut s’écouter les uns les autres pour élaborer des projets en commun, le vote n’est pas suffisant, il faudrait plus de relations humaines, problème actuel de la Russie.

     

    Pour éviter des conflits, il a été proposé d’enseigner l’Histoire des deux cotés vainqueurs et vaincus.

     

    Un paradoxe cité, est que les français demandent plus de démocratie, mais le taux d’abstention augmente, ce qui pourrait montrer que la démocratie est à revoir, les réseaux sociaux changent les moyens d’expression, le recours à la violence est de plus en plus utilisé comme moyen d’expression conduisant à de durs rapports de force.

     

    Remarque : le 6e cycle Kondratiev émis par des économistes en 2014, inscrit dans le texte n’a pas été commenté en séance.

     

    C.R. rédigé par Benoit Delcourt avec  Daniel Soulat.

     


    1 commentaire