• Comment mesurer la richesse ?

  • Commentaires

    1
    Pierre M.
    Mardi 10 Décembre 2013 à 17:28

    Comment mesurer la richesse ? Sans revenir sur les intéressants débats de samedi dernier, je voudrais avancer une petite incidente.

    Constatant (déjà, il y a 20 ans !) que le chômage ne pouvait même pas être résorbé par la croissance, André Gorz (philosophe et journaliste sous le pseudo de Michel Bosquet) notait dans un article publié par Le Monde diplomatique que "l'économie n'a pas pour tâche de donner du travail, de créer de l'emploi…", mais de "créer le maximum de richesses avec le moins possible de ressources naturelles, de capital et de travail". En conséquence, outre le volume accru de biens et services produits, la "vraie mesure de la richesse (devrait être) le temps libéré des nécessités et des contraintes économiques". Et il en appelait à l'édification d'une civilisation du temps libéré.

    Vingt ans après, comme aurait dit notre ami Dumas Alexandre, à droite comme à gauche, on persiste dans les mêmes errements : sans croissance point de salut et hormis la compétitivité point d'espoir.

     

    Errare humanum est, perseverare diabolicum. Bientôt peut-être connaîtra-t-on le véritable visage du Diable.

    2
    Mardi 10 Décembre 2013 à 21:38

    Tout à fait d'accord avec Michel Bosquet, dont les écologistes de tout poil devraient s'inspirer. Cela ressemble bien à du BSP (Bon Sens Paysan)...

    Cependant, et on en a déjà parlé souvent au Café-Débat, avoir une vision commune à l'échelle mondiale sur la croissance et la compétitivité est absolument nécessaire pour qu'un système alternatif à celui que nous connaissons puisse fonctionner. En effet, les gens ont un pouvoir d'achat stagnant ou en baisse. En conséquence, ils achètent ce qui est le moins cher. Pour que les produits soient moins chers, il faut être compétitif, c'est à dire finalement "créer le maximum de richesses avec le moins possible de ressources naturelles, de capital et de travail". Il faut donc, selon Bosquet, recycler et automatiser. Recycler c'est bien, on s'y met, mais pour le travail, cela revient à licencier et mettre le maximum de machines, ou payer les ouvriers au lance-pierres. Donc moins de pouvoir d'achat pour acheter ces produits. Si tout le monde essaie de faire les choses correctement, ça peut fonctionner,  mais il suffit qu'un seul ne joue pas le jeu de cette compétitivité revue et corrigée pour qu'il soit gagnant, ce qui oblige les autres à suivre. C'est le serpent qui se mord la queue, ou le cercle vicieux.

    Quant à la croissance, mesurée par le PIB, elle pourrait très bien diminuer selon l'adage de Bosquet, puisque si on recycle et qu'on automatise, on produira mieux et moins cher pour une demande égale. Mais alors, que faire des salariés devenus inutiles ? C'est là vraiment que tout est à inventer : civilisation des loisirs, salaire de vie, travail devenu ludique au lieu d'être obligatoire, etc.

    On a encore le temps d'attendre...

    3
    Pierre M.
    Jeudi 12 Décembre 2013 à 00:30

    Tout à fait d'accord avec Jean-Jacques : les écolos, avec leurs excès et leur démagogie, tuent l'écologie. En tout cas ils lui font perdre de sa crédibilité.

    D'accord aussi sur le fait qu'il y a loin de du souhaitable au réalisable. Tout le monde sait que le "travailler plus pour gagner plus" est une grossière supercherie, qui ne fait que de nous enfoncer dans l'impasse. André Gorz, comme Keynes en son temps – qui imaginait dans les années 30 que ses petits-enfants (c.-à-d. nous) ne feraient pas plus de 15 heures de travail par semaine – ont bien montré que, du fait de l'accroissement continu de la productivité du travail, les besoins globaux en force de travail ne peuvent que diminuer. On pourrait quasiment retourner la sentence : "travailler moins pour gagner plus". On est donc actuellement en pleine schizophrénie sociale. Et on ne voit pas comment on pourra en sortir. Poursuivre la fuite en avant, ce qu'on tente de réaliser actuellement, ne peut qu'aggraver la situation.

    Faut-il attendre une crise majeure pour "remettre les compteurs à zéro" ? On n'ose l'imaginer mais on peut le craindre. A l'exemple de la seconde guerre mondiale, à l'issue de laquelle a pu se mettre en place le programme politique du CNR, qui n'a pas été pour rien dans l'avènement des "trente glorieuses" en France. Autre exemple : la guerre de Sécession américaine dont l'issue a été l'abolition de l'esclavage, n'est pas due à l'opposition entre de gentils fédérés et de méchants sudistes, mais au fait que les industriels des États du Nord avaient plus d'intérêt financier à embaucher des ouvriers qu'ils ne payaient (peu) qu'à la tâche, plutôt que d'employer, comme dans les plantations,  des esclaves qu'il faut au moins nourrir chaque jour. La morale n'y est pour rien, c'est l'intérêt économique qui prévaut. Et on ne voit pas, à court terme du moins, quel intérêt économique il y aurait à une meilleure répartition de cette denrée rare qu'est devenu l'emploi.

    Pour en revenir au précédent débat, où est la solidarité dans tout ça ? Tout espoir est-il perdu ? Le système économique libéral actuel peut-il se contenter de modifications à la marge ? Que donnera le récent accord de l'OMC conclu à Bali il y a une dizaine de jours ? Il ne répond certes pas au problème posé, mais il est susceptible d'apporter un peu plus de cohérence dans les règles commerciales multilatérales.

    Tout en demeurant pessimistes, il n'est pas interdit d'espérer.

    4
    Hidalgo
    Jeudi 12 Décembre 2013 à 00:53

    L'article du monde diplomatique est juste dans l'idée, malheureusement biaisé par laxisme dans les faits par un système bancaire trop débridé. La finance a besoin de victimes pour maximiser ses profits, elle victimise: "l'homme au travail" en le dépossédant sans contre partie tout comme "Dame nature"... 

    Le "Prix psychologique" et les objectifs "financiers" font la paire pour cette besogne, quand l'un positionne des prix locaux souvent faussement bas(1), l'autre c'est à dire le financier prédateur se charge de réclamer sur ces prix des marges offshores(2) importantes qui sacrifient les salariés autochtones. La presse s'en est fait suffisamment l'écho! Il se peut que parfois le poisson se morde la queue comme le décrit Jean-Jacques, mais ce n'est le plus souvent pas le cas, en réalité(2) il s'agit bien par laxisme ambiant d'un sabordage progressif et sournois au profit de...

    Quand on sait que la finance a déjà été la cause des deux guerres mondiales, ce que l'émission d'Arte a brillamment illustré: "Noire Finance"(3). Une régulation des échanges bancaires serait bienvenue pour redonner une santé à l'emploi, et à l'impôt(4). En effet, il serait intéressant de réclamer sur ces factures offshores ou ces externalisations débridées, une taxe emploi au bénéfice direct des salariés autochtones. Cette taxe bancaire déclencherait en fait une ressource nouvelle à l'attention des salariés qui pourraient ainsi exercer un droit de préemption efficace sur les flux monétaires externes ou offshores de leur entreprise.

    Hidalgo

    (1) prix ayant pour attitude d'être trompeur, c'est à dire aussi fort que si le produit était produit sur place. L'actualité nous aura fourni quelques illustrations, par exemple des produits de luxes fabriqués à Bangalore... Cette approche est loin d'être isolée, elle est devenue la règle. 
    (2) L'opération est aisée, l'entreprise cherche à conserver ses prix en ayant simplement recours à une facturation artificiellement gonflée par l'usage d'un pseudo-prestataire (voyez cela comme une agence d'intérim mais à l'étranger) hors zone fiscale. Ces factures (de l'agence) sont toujours un peu plus faibles que l'emploi autochtone, elles sont prédatrices du travail seulement en apparence, car en réalité elle attaque le patrimoine. 
    (3) http://www.dailymotion.com/playlist/x29tkc_tchels0o_noire-finances/1#video=xu26i9
    (4) L'observation du circuit de trésorerie d'une entreprise révèle très clairement que le PIB (la richesse annuelle produite partageable au sein d'un pays) est l'effet du travail et de l'impôt juste après le prix acquitté par le consommateur. Or lorsque au sein d'une entreprise l'automatisation triomphe sur un aspect manufacturier: c'est l'impôt qui devrait l'emporter sur le travail et s'en retourner au consommateur (un peu comme le RSA). En l'absence de régulation bancaire cet impôt est défaillant (fuyant à l'offshore) tout comme la quantité de travail autochtone.

    5
    Hidalgo
    Mardi 17 Décembre 2013 à 21:36

    Un des fleurons de l'industrie française va passer dans d'autres mains alors même que les 
    équipementiers Français s'inquiètent pour leur avenir et engagent des poursuites 
    judiciaires contre des accords commerciaux passés entre PSA et la Chine. L'annonce est 
    tombée, PSA va devenir propriété chinoise à 50% par dilution du capital de l'entreprise. 
    Ceci n'est pas sans rappeler le livre d'un journaliste économiste Jean-Michel Quatrepoint 
    "Mourir pour le yuan" qui dresse un portrait historique de nos relations économiques avec 
    la Chine. 

    Toutefois, il semblerait également d'après l'affaire "Une Barbie ouvrière pour dénoncer 
    l'exploitation des ouvriers Chinois" (Figaro du 11/12/2013 à 13:32) qui reste un 
    épiphénomène si l'on se réfère aux nombreuses affaires passées; il semblerait au fond 
    que, la Chine et la France, deux victimes des aléas boursiers (bourse dont la vue est 
    toujours très court-termiste) finissent par se rencontrer. Cela garantit-il pour autant 
    une juste répartition de l'effort de création de richesses et un épanouissement des 
    personnes par l'emploi ou leur rémunération future? Rien est moins sûr au regard des 
    conditions et l'état du marché de l'emploi mondial. L'histoire a démontré qu'il faut 
    éviter de céder au protectionnisme forcené alors que la mercatique nous invite ardemment 
    à trouver les réponses en nous-même. 

    En effet, d'un point de vue mercatique il s'agit de considérer tout échange avec le monde 
    en définissant des zones de chalandise, chaque zone ayant sa propre logique de formation 
    des prix. Par conséquent, il est tout indiqué de chercher à diviser nos emplois avec le 
    monde en fonction de ces zones de chalandise. Si l'on s'en réfère à l'histoire, une 
    première zone de chalandise devrait se dessiner autour d'un noyau dur de l'Europe, peut 
    être les six ou les douze, voir même la France en tant que laboratoire de test. La 
    seconde zone concernerait l'Europe et la troisième le monde, dans l'optique de corriger 
    la répartition des emplois un peu comme si au final il s'agissait de corriger l'emploi à 
    l'aide de trois taux de TVA différents relatifs à ces zones, sauf que le fruit de la TVA 
    irait ici directement aux citoyens, c'est à dire nous. Vous ne comprenez rien, pas de 
    panique, la suite plus terre à terre et pratique devrait aider. Evidemment cette analyse 
    reste une hypothèse qui toutefois s'appuie sur des pratiques professionnelles empiriques, 
    l'analyse doit donc être confortée par ces méthodes existantes empiriques, le calcul et 
    des moyens peu onéreux, facile à mettre en oeuvre dont je ne dispose pas ici. Mais comme 
    ceci reste théorique, de quoi s'agit-il en pratique? 

    La matérialisation de ces zones de chalandise (voyez chaque zone comme des ensembles de 
    pays) signifie la lever d'une taxe d'un point de vue bancaire, soit une réglementation 
    bancaire transparente pour le consommateur mais qui corrigerait implicitement les prix en 
    apportant concrètement un salaire garanti pour tous sans exception. La levée de cette 
    taxe automatiquement appliquée par nos chers banquiers en observant les échanges sous 
    l'angle du nombre d'heures travaillées, se fait à partir de la projection d'un taux 
    horaire selon trois zones: la zone mondiale, européenne et locale ( le taux local 
    correspondant au SMIC). Exemple, si le taux horaire mondial est estimé par projection à 
    8€/h, un montant de 100 euros qui passe d'une banque hors zone à notre zone devient 
    100€/12,5h (c'est aussi simple que cela), l'entreprise qui importe doit donc régler 100€ 
    + 25€ de taxe pour l'emploi si le SMIC est à 10€/h (12,5 x 10=125€). On peut dire que la 
    banque a effectué une conversion de l'euro vers l'euro-jour-homme ou €JO pour donner un 
    sigle sympathique. Dès lors ce montant de 25€ constitue un capital disponible dans le 
    secteur d'activité de la transaction qui peut être préempté par un citoyen chômeur ou 
    salarié pour garantir son emploi au sein de son entreprise. 

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