• C.R. du 8 Sep.2018 La liberté est elle une illusion?

    Compte-rendu de la réunion du Café-Débat de SQY du 8 septembre 2018

    « La liberté est-elle une illusion ? »

     

    Comme on pouvait s'y attendre, ce n'est pas l'aspect philosophique du sujet qui a dominé la discussion, mais l'aspect social et pratique. Plus exactement, la plupart des interventions sont parties du postulat non avoué que nous sommes libres, et se sont attachées à inventorier comment cette liberté était entravée dans notre vie quotidienne et notre mode de vie.

    Le classement des interventions des participants est indicatif.

     

    Synthèse des interventions des participants (22 personnes)

     

    Sur le plan philosophique :

                        Même la science ne croit plus au déterminisme pur, la mécanique quantique en est le meilleur exemple, puisque le hasard est au cœur de ses lois

                        Ma liberté totale est une illusion, mais tout n'est pas écrit. Notre vie, c'est la possibilité de faire des choix entre des alternatives que nous n'avons pas choisies.

                        La liberté, ce n'est pas quelque chose d'extérieur, c'est une chose qu'on porte en soi, mais il faut en avoir conscience

                        Malgré le progrès des neurosciences, on ne sait pas comment fonctionne le cerveau ; la pensée apparaît simplement comme étant l'émergence de causes et de conséquences qui interagissent de manière complexe au niveau sous-jacent. Du cerveau émergent ainsi la pensée, la conscience, la liberté.

                        Selon Sartre, l'existence précède l'essence, ce qui signifie qu'on est libre de construire sa vie. La liberté est un mystère qu'on goûte chaque jour.

                        La liberté est liée à notre conscient ; notre inconscient est plutôt le lieu des contraintes, car y réside tout ce qui est le fruit de l'évolution, de la culture, de l'éducation

                        Il n'y a pas de Destin. Dieu, la nature ou le destin n'agissent pas sur nos vies à tout bout de champ, c'est une illusion totale.

                        Choisit-on librement ? Exemples de Lafcadio dans « Les caves du Vatican » de Gide, et le conte de l'âne de Buridan (voir les liens vers les corrigés de dissertation)

                        Agir trop rationnellement conduit souvent à une décision unique, c'est donc une contrainte pour l'exercice de notre liberté. A l'inverse, agir de manière irrationnelle, s'en remettre au hasard, permet d'agir librement, puisqu'on n'est soumis à aucune contrainte

                        La liberté est un concept subjectif individuel. De manière générale, c'est chercher à vivre bien quelles que soient les conditions de l'environnement.

                        Mais le sens de la vie d'un être humain est-il la recherche de la liberté coûte que coûte, ou bien la simple recherche du bonheur, fût-ce au prix d'un certain nombre d'interdictions ?

     

    Ce qui bride notre liberté de penser :

                        on peut toujours penser ce qu'on veut, mais il faut être vigilant pour le dire. La pensée dominante d'une époque ne le tolère pas toujours, un des meilleurs exemples en est celui de Giordano Bruno, brûlé en 1600 pour avoir prétendu que la Terre tournait autour du soleil

                        l'état de notre cerveau limite notre liberté de penser : les capacités innées sont différentes selon les individus ; les accidents peuvent encore les restreindre ; on a souvent des pensées qui nous traversent l'esprit sans qu'on l'ait voulu, on ne sait d'où elles viennent.

                        On peut être en prison et se sentir libre, parce qu'on est en phase avec ce qu'on pense, comme les prisonniers politiques qui assument leurs choix et leurs opinions. On peut aussi être libre physiquement et être prisonnier de son vécu, de ses croyances, sans s'en rendre compte.

                        On ne peut tout connaître, par conséquent, quand on doit faire des choix sans savoir, il faut faire confiance

                        Tout le monde ne peut pas devenir Einstein, mais apprendre, se cultiver, accroître ses connaissances nous fait évoluer vers une plus grande liberté de penser

     

    Le cadre contraignant de notre liberté :

                        Nous sommes les héritiers de notre espèce, notre liberté s'exerce dans le cadre des contraintes liées à l'évolution de nos capacités, et à celle de nos cultures

                        Notre liberté s'exerce dans un cadre spatio-temporel donné, donc dans un intervalle restreint

                        La liberté du corps est limitée : on ne peut pas voler, même si on le veut. Mais on peut accroître nos capacités physiques par le travail

                        Faire des choix contraignants, c'est assumer sa liberté, ce n'est pas faire n'importe quoi, c'est résister au conditionnement

                        On se sent libre, intuitivement, mais en fait on l'est moins qu'on le sent. Ce sentiment est éphémère, il peut changer d'un jour sur l'autre en fonction de multiples raisons ponctuelles. Nous n'avons qu'une marge étroite de liberté

                        On aliène souvent sa liberté devant une volonté extérieure puissante, parce qu'il est plus facile d'obéir que de résister. C'est même parfois confortable.

                        Lorsqu'on est riche, il est plus facile d'être libre que si on est SDF. Liberté du compte en banque...Pouvoir de l'argent sur le degré de liberté de chacun.

                        Relations médecin – malade : a t-on le choix de refuser une thérapie proposée ?

                        La liberté en occident est fortement liée à l'abondance de biens. Si la catastrophe écologique qui se profile se produit, ce ne sera plus le cas. Personne n'en est vraiment conscient.

     

    La liberté et la morale

                        Il faut respecter les autres en société, et respecter aussi les animaux : c'est une question morale qui nous empêche de faire ce qu'on veut

                        Les lois du groupe brident souvent la liberté de choix personnel, par exemple pour la fin de vie et l'euthanasie, on ne peut le faire en France, il faut aller à l'étranger. Si la personne vulnérable n'est plus lucide, se pose le problème de décider à sa place. Une longue discussion a porté sur la liberté de choix des personnes Alzheimer et sur la liberté de conscience de ceux appelés à décider pour les autres

                        On exerce sa liberté au nom de valeurs qui reflètent notre conception du monde. Exemple : le gendarme qui a sacrifié sa vie devant des terroristes près de Toulouse a exercé sa liberté au nom de ses valeurs.

                        La justice, lorsqu'elle reconnaît un criminel comme irresponsable, affirme le déterminisme. Lorsqu'elle le trouve responsable, elle le nie. C'est un paradoxe difficile à résoudre.

     

    Ce que l'on peut faire librement :

                        On a plus de libertés dans certaines cultures que dans d'autres. Chez nous, nous ne sommes pas prisonniers. La liberté se conquiert au sein d'une culture donnée, c'est un moteur qui nous anime pour vivre pleinement.

                        En occident, on peut aller et venir, on peut se réunir comme on veut, s'habiller comme on veut, voir qui on veut, faire des enfants ou pas, choisir un métier, ...De ce point de vue, la liberté n'est pas une illusion.

                        Développer ses connaissances permet d'être plus vigilant, plus conscient des choix qu'on fait. Mais trop réfléchir conduit à éliminer plus de choix possibles, donc restreint notre liberté.

                        Mais il faut rester vigilant sur la pérennité de ces libertés, notamment sur le phénomène sectaire qui peut déboucher sur une prison intérieure par la main-mise sur l'autonomie de pensée des personnes soumises à un lavage de cerveau.

     

    Liberté, politique et économie

                        On est plus libre en démocratie que sous un régime dictatorial, communiste ou comme sous  l'Ancien Régime, où seuls les nobles étaient libres, contrairement aux serfs. En démocratie, la liberté est un point central.

                        En démocratie, on a juste la liberté de choisir, et encore, nos représentants. C'est l'administration qui a le pouvoir et qui multiplie les lois, règlements, normes, qui brident considérablement la liberté individuelle des citoyens au nom de l'intérêt du groupe, ce qui n'est pas toujours le cas.

                        Le désir de liberté des citoyens devrait s'exprimer plus souvent et plus directement pour s'opposer aux contraintes voulues par le gouvernement et l'administration

                        Pour voter, il faut exercer d'abord son esprit critique, se renseigner, discuter, et essayer de saisir le second degré dans les programmes des candidats. La liberté de choix s'exerce ensuite.

                        La Révolution de 1789 : on dit que c'était au nom de la liberté du peuple, en fait elle résulte d'un problème économique aigu.

                        Il faut trouver un juste équilibre entre la liberté d'entreprendre, d'embaucher et de licencier d'une part, et la nécessité de protéger les travailleurs par des réglementations adéquates. Il faut respecter au minimum la déclaration des droits de l'homme

     

    Pour conclure : une citation de Jean-Jacques Rousseau :

     

    « Je n'ai jamais cru que la liberté de l'homme consistât à faire ce qu'il veut, mais bien à ne jamais faire ce qu'il ne veut pas. »

    C.R. rédigé par Jean-Jacques Vollmer.


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