• Les crises des temps modernes sont-elles de graves menaces pour notre modèle civilisationnel ? (invitation à la prospective)

     

    En dépit de changement d’horaire, dû aux risques de chahut pendant la retransmission d’un match de rugby, la séance a réuni 16 participants, dont deux nouveaux.

     

    Comme de coutume, le sujet proposé a été peu abordé : les diverses thématiques qui y étaient présentées ont surtout provoqué de nouveaux questionnements et des réponses diverses. Pour autant ce ne fut pas moins intéressant et animé.

     

    La démarche prospective, même si elle fut quelque peu oubliée, a nécessité quelques éclaircissements. La prospective « science de l’homme à venir » dont le concept assez récent a été formulé – un intervenant l’a cité –par Gaston Berger, s’oppose aux autres méthodes de prévision, mathématiques notamment, en ce qu’elle est interdisciplinaire et introduit des paramètres qualitatifs. Ce sont les Américains qui, les premiers, en firent usage à la fin de la dernière guerre mondiale.

    Il n’y a pas une seule méthode : les principales sont la méthode Delphi, celle des scenarios. Ce qui était proposé ce jour était beaucoup plus limité : à partir d’un thème particulier, tenter de relever les faits porteurs d’avenir et essayer, bien modestement, d’en tirer des conséquences. Mais, alors que ce texte se voulait seulement factuel, la plupart des intervenants l’ont jugé trop pessimiste.

     

    Principaux sujets abordés (regroupés de façon thématique), questions, réponses

    1. Un des principaux problèmes des temps à venir est la recherche permanente de l’équilibre entre consommation et population en croissance, Malthus l’avait bien vu. On devrait pouvoir compter sur les ressources de la mer.

    Il est vrai que Malthus s’était trompé. Bien plus, l’économiste danoise Ester Boserup, avait démontré au siècle dernier que, par le jeu de la pression démographique, la population est une richesse. A noter qu’elle s’était beaucoup préoccupée du rôle des femmes. On peut juger de la validité de sa thèse lorsqu’on observe qu’aujourd’hui la puissance et le rayonnement d’un Etat est très lié à l’importance de sa population (Cf. Inde).

    S’agissant des femmes, on insiste sur l’importance de leur éducation.

     

    2. Le concept de crise doit être explicité. Ce n’est pas nécessairement un événement négatif, c’est en tout cas une rupture, une mutation, attendue ou non, D’ailleurs on cite souvent le terme chinois qui traduit ce concept : wēi jī qui se décompose en deux caractères wēi qui signifie « danger » et pour « opportunité ».

     

    3. Tous les humains n’ont pas les mêmes responsabilités dans les crises. Chaque Américain pèse plus que bien d’autres pour ce qui concerne la consommation de ressources (énergie en particulier).

     

    4. Les vraies crises de notre temps ne sont pas économiques mais culturellesC’est là une vérité qui gêne (voir ci-après § 5). En premier lieu il faut donc dénoncer l’ignorance. Sont cités également, en vrac, le travail aliénant, la recrudescence de dépressions chez les jeunes, les complications administratives françaises, ainsi que leurs contraintes (comme toujours est citée l’obligation vaccinale que quelques-uns réprouvent),  les contraintes communautaires européennes, l’ultralibéralisme, les excès de la normalisation, la prégnance de réseaux sociaux, la culture de l’individualisme...

    On insistesur la complexité du monde moderne qui ne permet pas de comprendre la situation présente. Est évoquée aussi la question de la responsabilité de l’homme, érigée en principe par Hans Jonas.

     

    5. L’accent est mis sur le spirituel et le culturel. Sur la question des valeurs. La question est posée « Qu’est-ce qui fait d’un bébé un homme » (une féministe pure et dure pourrait ajouter « une femme »). C’est un processus très complexe. A titre d’exemple, on cite un point de vue énoncé par le sociologue Henri Mendras qui expliquait le comportement cyclothymique des Russes par la façon dont ils étaient emmaillotés bébés, très serrés, provoquant périodes de contraintes suivies d’heureuses libérations.

    Le comportement des êtres humains dépend donc largement du contexte culturel. Y a-t-il choc des cultures ? En tout cas il n’y en a pas une qui soit supérieure à l’autre. Différence ne veut pas dire supériorité. Et pourtant elles sont très différentes : citation est faite des  4 ontologies de Philippe Descola. Il y a en tout cas des difficultés de compréhension mutuelle.

     

    6. Comment mieux se comprendre ? Faut-il parler la même langue ? Une langue unique comme l’espéranto ? Pas réaliste. Chaque langue a son propre génie. Umberto Eco à « La recherche de la langue parfaite » montre qu’il n’y a aucune qui puisse traduire la totalité de l’expression humaine : l’impérialisme de l’anglais fait dégénérer cette langue. A la limite, pour lui, ce serait peut-être le langage des Aymaras, peuple indigène de Bolivie, qui serait le plus pertinent !

    En tout cas, si le bi- voire le multilinguisme est une chance, la langue française est un trésor qu’il nous faut préserver. Trésor en mutation dans le temps et dans l’espace. On peut regretter que nos responsables politiques n’en soient pas conscients (baisse des moyens des Alliances Françaises : on croit des investissements industriels ponctuels plus efficaces que l’investissement à long terme dans la culture. Ce n’est pas le cas des Chinois (Instituts Confucius).

     

    7. Enfin certains s’interrogent sur ce qui peut nuire à notre culture, à notre civilisation. Inévitablement la focale est dirigée vers le problème de l’immigration. Les avis sont assez tranchés.  On estime que tout migrant doit se plier aux règles du pays qui l’accueille. Mais n’y en a-t-il pas qui le refusent et deviennent des ennemis de notre civilisation ? C’est sans doute une minorité qui s’applique à détruire nos valeurs, mais on ne peut l’ignorer. Pourtant il ne faut pas tirer une règle générale de quelques cas particuliers : pour un Al Capone aux USA combien d’Enrico Fermi ou de Frank Sinatra ? C’est souvent un enrichissement culturel pour le pays d’accueil.

    Aléatoire et risquée, l’émigration est rarement un choix. Dans le passé le moteur en fut la famine (les Irlandais qui ont donné les Kennedy à l’Amérique), la pauvreté (les Italiens en Amérique du Sud,) De nos jours encore les guerres et la famine. Dans certains cas, comme en Afrique où existe le système de la tontine, les villageois se cotisent et donnent ainsi les moyens à l’un de leurs jeunes de s’expatrier, à charge pour lui de faire bénéficier à son village d’une partie des revenus qu’il pourrait tirer de son expatriation. Souvent nécessaire pour la survie de communautés, elle est très risquée et nécessite confiance et courage.

     

    P. M. 16/10/2023

     

    Note complémentaire

     

    Un participant habituel (Bruno) ne pouvant pas être présent à la séance avait envoyé ses observations par anticipation. Compte tenu de la densité des échanges, il n’avait pas été possible de les discuter. Les voici présentées ci-dessous, accompagnée (en italiques)pour la seconde de quelques commentaires de l’animateur du débat (PM)

     

    1°) - ... les crises ou les catastrophes ne sont pas toutes de même nature : Il y en a qui sont naturelles, d'autres résultent des ambitions des hommes, ou de leur manque de prévoyance. ...

     

    2°) - Dans la deuxième partie "Invitation à la prospective", tu sembles supposer que le réchauffement climatique est inéluctable ...

    Mais c'est désespérer de la sagesse humaine. Le réchauffement peut être contenu dans des limites supportables si les gens aisés de la planète, qui sont souvent aussi des diplômés des universités et capables de comprendre les impacts de leur mode de vie, admettent la démesure du mode de consommation matérielle qu'ils ont atteinte, et comprennent que des limites doivent être posées à notre parc mécanique. On doit faire un usage à la fois plus sobre et plus convivial de ces outils mécaniques. Le bonheur est-il dans la multiplication des machines, ou dans les bonnes relations avec notre entourage humain ? Nous sommes face à un problème éthique, et c'est sur ce plan que nous devons interpeler nos concitoyens les plus aisés, en raison des responsabilités qu'ils exercent dans la société. 

     

    Certes on peut essayer de compter sur la sagesse des êtres humains. Quoique… Une chose est bien connue de tous les économistes et/ou psychologues, c’est la préférence pour le court terme. C’est encore plus vrai pour les hommes politiques. Les modestes engagements pris à l’unanimité de la COP21 de 2015 (conférence de Paris) de Paris n’ont pas été tenus. 

    Et,  tous les spécialistes le savent (Jean Jouzel par exemple) : c’est le stock actuel de CO2 et non le flux qui provoque ce réchauffement : même si nous n’émettions plus rien, le mal est fait. Évidemment il sera plus ou moins préjudiciable selon l’importance des émissions futures. En tout cas le réalisme n’engendre pas le pessimiste : l’espèce humaine est très résiliente. 

     

    P.M. 17/10/2023


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  • C .R. du 30 Sep 2023  Quelle école pour demain ?

    Nous étions 15 Présents.

    Le  texte d’introduction a été trouvé trop catastrophiste par certains.

    Les problèmes de l’école ont été examinés dans leurs différents aspects : les professeurs, les enfants et les parents, l’organisation et le temps de travail des enfants, la complexité du problème et les changements trop rapides dans notre société, la présence des réseaux sociaux.

    Les professeurs.

    Ils sont passés d’un niveau bac+2 à un niveau bac+5 pour les professeurs des écoles. Ce niveau est tout à fait suffisant, cependant la pédagogie leur est peu enseignée, ce qui pose problème dans un monde en mutation permanente.

    Leur rémunération est insuffisante, a diminué , tout le monde en convient.  Outre les difficultés que cela produit dans leur vie de famille, c’est un signe que leur profession est déconsidérée.

    Les profs sont accusés de ne pas beaucoup travailler, ce qui est vrai si on ne considère que leurs heures de présence à l’école. Mais à cela s’ajoute la préparation des cours, et la correction des copies qui leur prend au moins autant de temps. Leurs vacances sont cependant plus longues que pour les autres professions.

    Taper sur les profs ne serait-il pas un sport national ?

    On leur demande de plus d’exercer le métier d’assistance sociale ou d’infirmière, ces professions ayant disparu des écoles et collèges.

    Contrairement à ce qui se passait sous la troisième République, les professeurs sont parfois moins diplômés que les parents d’élève, ce qui permettrait à ces derniers de les regarder de haut.

    Les enfants et les parents.

    Le respect des professeurs par les enfants laisse bien souvent à désirer.

    Certains enfants arrivent à l’école sans savoir parler le Français, comment pourraient-ils suivre ?

    Il y a dans notre société des villes où se forment des ghettos, l’enseignement y est difficile ! Cela est encouragé par la « carte scolaire ». Avant de parler de l’école, ne faudrait-il pas parler de la société ? Pourtant, de gros efforts on été faits pour ce qui est des logements à loyer modéré.

    Les parents sont parfois peu intéressés par les études de leurs enfants, mais le plus souvent il sont trop intrusifs et ne font pas confiance aux enseignants, ce qui rend le travail peu coopératif.

    Le désir d’apprendre aurait-il disparu chez les enfants : un participant pense le contraire. Et ce désir est fondamental, et l’école est le moyen de l’assouvir, c’est une chance !

    L’Education Nationale s’appelait autrefois l’Instruction Publique, ce qui avait le mérite de laisser à la famille  la responsabilité totale  de l’éducation.

     

    L’organisation et le temps de travail des enfants.

    L’école primaire ne réussit que partiellement sa tâche principale qui est d’apprendre à lire, écrire et compter ; comme le redoublement est évité, peut-être pour des raisons budgétaires, une partie des enfants arrive en 6eme sans avoir maîtrisé ces bases ; ils n’ont alors aucune chance de pouvoir suivre les cours. Pourtant des efforts ont été faits : pour les élèves qui ont besoin de soutien, des classes spéciales ont été créées, avec des effectifs de12 enfants seulement, ce qui a donné de bons résultats.

    Les programmes sont souvent trop ambitieux pour le niveau des élèves. Une participante à trouvé qu’apprendre par cœur ne sert pas à grand-chose, qu’il faudrait apprendre aux enfants à se poser des questions et éviter la compétition.

    Les grandes vacances ont été raccourcies d’un mois depuis la guerre 39-45, au profit des « petites vacances » de deux semaines toutes les six semaines, ce qui paraît raisonnable. Cependant, la semaine de quatre jours complets par semaine semble à certains difficile à supporter pour beaucoup d’enfants.

    La complexité du problème et les changements trop rapides dans notre société.

    Le problème de l’école en France est complexe. Chaque ministre de l’enseignement a ses idées sur la question, et oriente à sa manière la façon de le résoudre. Par exemple, on change de méthode  d‘apprentissage de la lecture : méthode globale vs b-a-ba puis  une méthode mélangeant les deux; on supprime les mathématiques pour les bacs littéraires, pour, un an après, les remettre. On supprime plus ou moins les cours de pédagogie pour les professeurs (dans les I.U.F.M. qui soit disant ne servaient à rien). La réforme Haby(1975), qui prévoyait que tous les enfants avaient droit à aller au collège, était pour certains  trop ambitieuse pour l’époque.

    On demande à de brillants scientifiques (cf.Cédric Villani) des rapports sur l’école, alors qu’ils n’ont sans doute pas la connaissance de ce qu’est un élève du primaire ou du secondaire ! En particulier, les élèves de maternelle ont des cerveaux encore immatures !

    La question de la répercussion des inégalités des familles sur le devenir des enfants a été abordée. Cette répercussion ne semble pas évidente à un participant : son expérience lui dit que le plus important, exemple à l’appui,  n’est pas la richesse des parents, mais bien l’attention qu’ils portent à leur enfant, leur présence, et surtout leur respect pour la culture, et cela même si leur niveau culturel est modeste ; il est vrai que, dans ces conditions, les enfants d’enseignants,  d’ingénieurs  ou de médecins semblent  avantagés.

    Pour avoir une chance de résoudre le problème, il faudrait faire ce qu’on appelle un audit : analyser froidement le problème, sans à-priori, ensuite essayer de le résoudre, de même qu’on fait le ménage chez soi avant d’accueillir des invités.

    Le problème est d’autant plus complexe que notre société change très rapidement, de nouvelles matières à enseigner apparaissent (informatique par exemple) tandis que d’autres disparaissent. Chercher sa vocation devient pour les élèves difficile, car les métiers eux aussi peuvent disparaître, laissant la place à d’autres.

    Les réseaux sociaux.

    Les dégâts produits par les réseaux sociaux sont, pour certains, évidents : ils fournissent des informations incontrôlées (leurs auteurs souvent ne signent même pas de leur nom), ils donnent l’illusion de connaître tout en remplaçant la mémoire par le clic, ils captent la concentration des enfants, ils favorisent le harcèlement de certains enfants par d’autres. Il sont même, pense un participant, une « école d’inattention ». Pour d’autres participants, c’est la presse écrite qui génère la « pensée unique », et donc n’inviterait pas à l’esprit critique.

    Il n’a pas été démontré que la décadence de nos écoles par rapport à celles de nos voisins (un classement en union Européenne nous place en 20ême position sur 27, alors que nous étions dans le peloton de tête il y vingt ou trente ans), que cette décadence était produite par l’utilisation à outrance d’internet.

     

    Peu de propositions positives ont été faites. Pourtant on pourrait penser qu’il faut rétablir la formation pédagogique des professeurs (faite autrefois dans les  I.U.F.M.), et enseigner les méthodes générales d’étudier un problème ; et enfin et surtout de travailler  l’esprit critique.

     

    C.R. rédigé par Benoît Delcourt


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  • Quelle école pour demain ?

     

    Dans les années 70, les sociologues Bourdieu et Passeron constatent que la proportion d’individus provenant des classes populaires accédant aux études supérieures reste très faible(les héritiers). Même s’il y a égalité dans l’accès à l’école, il n’y a pas égalité sociale.

    Le monde a évolué, le monde va mal, la société va mal, l’école va mal. L’école de la république qui était un ascenseur social ne l’est plus, ou presque plus, l’école qui était pour tous se scinde en deux donc la société se scinde en deux donc danger !!

    Le niveau scolaire a baissé, le niveau des profs a baissé, la société devient bête. Les parents ont abandonné l’éducation de leurs enfants, les enfants sont déboussolés, rencontrent des difficultés à l’école, les enseignants ont des difficultés à transmettre ce pourquoi ils sont là : le savoir.

    Ils sont obligés de gérer les problèmes avant l’enseignement !!

    Le constat est un nivellement par le bas.Le certificat d’études correspond aujourd’hui au brevet ! On accède à la fac avec un niveau brevet, etc. etc.

    Les programmes changent pratiquement à chaque gouvernement ! On enlève d’un seul coup l’histoire ou on la modifie, on supprime les maths, ou la philo pour les remettre un an deux après !!

    Modifier l’enseignement pour s’adapter au monde moderne, pas de problèmes, il faut juste ne pas oublier d’où l’on vient, comment s’est construit le monde d’aujourd’hui. Cela s’appelle l’évolution. A condition de ne pas faire comme ce lycée qui interdit aux professeurs d’aller voir avec leurs élèves le film sur Simone Veil, un film sur l’homophobie en Afrique ! Aux Etats-Unis se pose la question de modifier certains dessins animés ! On propose en histoire de d’oublier certains moments de l’histoire !

    A force de tout modifier sans réfléchir c’est la catastrophe, il ne reste rien que les réseaux sociaux !  Et la violence. Comment s’exprimer si nous ne savons pas communiquer. En arrivant au collège les élèves, pour la plupart ne sont pas au niveau. Si on ne sait pas lire, écrire correctement, compter, il est impossible de suivre les cours.Le collège et le lycée sont là pour continuer l’enseignement, pas pour refaire le CP.  15 à 20% des élèves sont en état d’échec scolaire définitif à la sortie du primaire selon un expert du ministère.

    Inculture engendre violence, société individualiste, société du profit, de l’argent facile, pourquoi aller à l’école ? Si les élèves ne savent ni lire ni écrire, ils ne comprennent pas ce qu’ils apprennent, laissent tomber, s’ennuient, se détournent de l’école et ne sont pas forcément très heureux.

    La baisse de niveau serait-elle volontaire ? Plus les gens sont incultes, plus ils sont manipulables ! Nous sommes dans une société de la peur, de l’abêtissement de la population :  téléréalité, fausses informations, harcèlement à l’école etc.

    En 1984 déjà, un article du Monde faisait état d’élèves instables, déboussolés et en échec scolaire définitif ; dans les mêmes années l’écrivain journaliste Maurice Maschino faisait le même constat. En 2005 Jean Brighelli écrivait un livre sur « La fabrique du crétin » !!

    Ce qui rappelle aussi le fameux livre d’Orwell « 1984 ».Dans ce monde tous les individus sont sous contrôle et se ressemblent, tout est uniformisé. On a affaire à un monde sans liberté. Paru en 1949.

    Autre exemple : « Fahrenheit 451 » paru en 1953 ! ce livre dépeint une société futuriste (la nôtre ?) où la lecture et le savoir mettent en péril le pouvoir en place. Une unité spéciale de pompiers est chargée de brûler tous les livres afin de maintenir la population sous le joug d’un gouvernement totalitaire. Les livres sont considérés comme dangereux et interdits. Ils sont des objets de résistance qui doivent être lus avec discrétion pour ne pas être brûlés,ou appris par cœur pour pouvoir se transmettre à nouveau aux nouvelles générations.

     

    En sommes-nous là ? 

     Joëlle Le Cocq                30 Septembre 2023

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  • La crise financière et bancaire s’est révélée de manière spectaculaire, il y a un an. Depuis, de nombreuses actions ont été engagées, certaines avec succès, pour d’autres, les effets sont à venir. Peut-on dire que l’Europe va sortir progressivement de la crise ? Et quand ? Et de quelle crise, s’agit-il, n’y a-t-il pas plusieurs crises qui se juxtaposent : financière et bancaire, économique,  matières premières, environnementales… ?

     

    1. Le rappel des faits

     

    11. Les « subprimes » (prêt à risque)

    Pour loger les plus pauvres, trouver le financement nécessaire à ces dépenses et par là-même gagner beaucoup d'argent, les systèmes bancaire et immobilier des Etats-Unis ont inventé un système d'une extrême vulnérabilité. Des prêts  à des taux très attractifs les 2 premières années, mais ensuite, au prix du marché ont été proposés. Une spéculation implicite s'est opérée avec une montée des prix de l'immobilier américain. Cela a fini par faire retourner le marché et augmenter les taux.  La crise a eu lieu lors de l'été 2007, au total, 3 millions de ménages n'ont pu faire face à leurs échéances de remboursement et  y ont perdu leur logement et leur épargne. La valeur de l'immobilier devenu propriété des banques s'est effondrée devant le nombre de logements à vendre.

    12.     Le marché monétaire

    Les opérateurs ont mélangé le financement de l'immobilier des USA avec les SICAV monétaires. C'est ce qu'on a appelé la « titrisation », on transforme des titres immobiliers en titres monétaires, en échappant  à la surveillance des banques centrales.  Les « subprimes » boostent alors le marché monétaire et pourrissent le tout, à l'exemple d'une paella où l'incorporation de coquillages de mauvaise qualité entraine la dégradation de l'ensemble du plat.  En 2007, la dégradation s'étend à l'ensemble du marché monétaire.

    13.     La multiplication des faillites

    Les risques de faillites se sont développés, certains établissements ont été repris et d’autres  ont disparu. On pouvait penser qu'il n'était  pas possible de faire faillite quand on est d'une taille importante, c'est ce qui est arrivé à Lehman Brothers, un des plus importants opérateurs au monde qui n'a pas été sauvé par l'Etat américain. Cela s'est réalisé le 15 septembre 2008, c'est  symbole le plus grave  de la crise bancaire.

    14.     La diffusion de la crise

    La transmission s'est généralisée car tous les établissements bancaires interviennent sur le plan mondial, et quand l'un ne peut faire face à ses échéances, cela a des conséquences pour les autres qui lui ont fait crédit. Progressivement, suite à ces défaillances, le crédit que les banques se faisaient entre elles s'est effondré. Comme il y a des besoins de liquidités, dans toute l’activité économique, et en particulier pour les fonds de pension américains, qui sont en charge de l'essentiel des retraites, à régler chaque mois, les agents ont vendu rapidement ce qu'ils possédaient, en particulier les actions, dont les cours se sont effondrés. C'est alors que l'on a observé la baisse vertigineuse des Bourses mondiales, les sociétés cotées ont perdu un pourcentage important de leur valeur alors que leur situation réelle et la valeur de leur patrimoine ne justifiaient pas cet effondrement. 

    15.     La position de l'Europe

    Dans un premier temps, il y a eu une réponse européenne commune et coordonnée. Il fallait rétablir la confiance et  cela nécessite du temps et des actions durables. Le renforcement des fonds propres des banques a  limité leur fragilité. Les Etats se sont engagés pour se substituer au crédit-interbancaire défaillant afin de sauvegarder les possibilités de distribution du crédit. Le rôle de la banque centrale européenne et de l'euro ont été stratégiques.

    Les interventions coordonnées des autorités européennes et américaines en octobre 2008 ont été limites, car à quelques jours près, le système était au bord du précipice avec un effondrement complet du système bancaire international. Pensons que des pays aussi libéraux que les Etats-Unis et le Royaume Uni ont nationalisé des banques !

    Mais lors du  déclenchement de la crise, tout ceci a été similaire à l’intervention  des pompiers, lors d’un incendie, avant d’entamer un lourd travail de reconstruction, et de soigner le mal.

     

    2. Les causes de la crise.

     

    21.     Un marché financier international sans foi, ni loi

     L'origine de la crise est essentiellement lié au  fait qu'il n'y a ni réglementation, ni surveillance dans ce domaine. Les « subprimes » aux USA ont été gérés hors du bilan des banques. S'il n'y a pas de garde-champêtre, les voleurs de poules font la loi. Il faut organiser et réglementer le marché financier mondial, à chaque crise, des ajustements sont possibles.

    22. Les acteurs

    Ce qui a failli, ce sont les hommes et pas les techniques. C'est une faute morale, on a prêté alors que l'on savait qu'il existait un risque majeur de non-remboursement.

    On a vendu des produits dont les vendeurs ne comprenaient pas eux-mêmes le fonctionnement. Face à l'attrait de ces produits, les banques voulaient toujours faire mieux que leurs concurrents.

    Il n'y a pas de pilote, personne n'est en charge de surveiller ses pratiques. Le FMI (Fonds Monétaire International) a peu pouvoir dans ce domaine.

     

    3. Qu’a-t-on fait depuis ?

     

    31.     Le soutien aux banques

    Les banques ont en France, signé des conventions avec l'Etat via un Institut de Régulation des banques pour contrôler les ouvertures de crédit aux PME, la rémunération des dirigeants, les règles de fonctionnement. Un médiateur a été mis en place avec un rôle d'arbitre. Quand il n'y a plus de confiance entre opérateurs bancaires, il ne reste de confiance que dans les Etats, qui interviennent pour permettre d'ouvrir à nouveau des crédits. Si les règles ont été mises en place, on constate que le crédit est devenu plus difficile pour les entreprises et les particuliers. Les banques se sont rétablies, mais pas les entreprises, et le chômage augmente fortement.

    32.     Une réglementation internationale minimale

    Il faut donner un statut aux agences internationales de notations, réglementer les « hedge funds » (fonds spéculatifs), et pour surveiller tout cela confier une mission au FMI ou créer un autre organisme. Comme ce rôle sera très important, il est nécessaire qu'à côté des techniciens, il y ait des politiques avec un mode de gouvernance. Le G20 a remplacé le G8, et vient de délibérer à nouveau, à Pittsburg, aux Etats-Unis. On pourra  faire un bilan des différents chantiers engagés : relance économique, Fonds Monétaire International (FMI), normes comptables, encadrement des bonus, paradis fiscaux, agences de notation, supervision financière, « hedge funds » (fonds spéculatifs)…

    33.    Les plans de soutien à l'économie

    Dans ces circonstances, il est essentiel de soutenir l’activité économique. Tout ce qui touche à l'investissement est essentiel car cela prépare la société de demain. Si on veut être cohérent avec les inquiétudes de l'avenir, il faut investir fortement dans les technologies de l'environnement, facteur de rentabilité car les USA vont s'y mettre et les marchés vont se développer.  Le projet de grand emprunt lancé par le président Sarkozy est de cette logique, mais il ne peut être traité sans aborder les problèmes d’endettement.

    34.     Un problème d'éthique

    Les valeurs fondatrices de l’économie de marché sont aujourd'hui manquantes, les « néolibéraux » ont effacé des valeurs essentielles  telles que le respect du partenaire ou  le sens de la mesure. Il faut bien se rappeler que l'idéologie néolibérale représente le fondement des idées économiques des républicains américains au pouvoir depuis 10 ans. Il est donc logique que des réflexions s’engagent sur le sens des valeurs dans nos sociétés.

     35.    L’endettement

    Tous les Etats se sont endettés à des niveaux jamais atteints en temps de paix. La France est dans une situation particulière, car elle a abordé la crise avec un endettement plus important que celui de ses partenaires. Elle a donc moins de possibilités de relance, et elle a augmenté de manière considérable cet endettement, qu’il faudra résoudre rapidement par des mesures qui seront désagréables.

    Jean-Pierre Clève


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  • Les plus anciens organismes de Micro finance (1) peuvent être fiers de leur engagement : donner des moyens d'action aux pauvres. Ils sont conscients des défis qu'affronte la micro finance aujourd'hui. La pauvreté possède des racines complexes et le microcrédit ne peut constituer à lui seul un remède rapide. Pour les organisations qui investissent dans les Institutions de Micro Finance (IMF) telles que la SIDI ou Oikocredit, parvenir à dégager un bénéfice sur investissement tout en restant fidèle à leur mission sociale constitue un véritable défi.

    Leur objectif est de fournir des services financiers aux entrepreneurs pauvres et marginalisés, de réduire la pauvreté et de créer une société plus juste à l'échelle mondiale. En tant que promoteur d'investissements sociaux, elles emploient leurs ressources financières à soutenir les petites entreprises qui créent des emplois, génèrent des revenus et donnent des moyens d'action à des individus pour qu'ils améliorent leurs conditions de vie. Pendant de nombreuses années, ils ont été pratiquement les seuls à financer des IMF. Lorsque d'autres acteurs se sont mis à investir, ces derniers ont souvent privilégié le retour sur investissement par rapport aux retombées sociales. Ces organisations préfèrent collaborer avec de grandes IMF urbaines qui ont fait leurs preuves et dont les taux de risques sont faibles. Or la SIDI  et Oikocredit luttent pour procurer des services financiers à ceux qui sont privés d'accès aux banques classiques. Par conséquent, leurs investissements vont en priorité vers de petites organisations, souvent basées en milieu rural, qui ont un impact social véritable. Résultat, plus de 50 % de leurs portefeuilles est placé dans des petites et moyennes IMF.

    Au cours des années, certaines IMF avec leur croissance ont perdu de vue leur mission sociale, cherchant surtout à élargir leurs activités et à réaliser des bénéfices. Visant la maximisation du profit, elles misent sur leur image d'institutions responsables au plan social. En Inde par exemple, la micro finance devient une activité de plus en plus commerciale, dont l'intérêt pour les bénéfices va croissant. Les IMF se font concurrence et de nouvelles institutions s'adressent aux mêmes clients des mêmes zones. Cette concurrence féroce est souvent synonyme de surendettement des clients et de pratiques abusives.

    Si la micro finance a gagné en popularité, le niveau des critiques à son égard aussi - et à juste titre. Des voix critiques s'élèvent, qui interrogent les objectifs de ces organisations et préviennent des conséquences négatives pour les clients et pour tout le secteur. Les évaluations permettent de surveiller les opérations et œuvrent au maintien de l'intégrité du secteur. La micro finance devrait différer de la banque classique. Dans le domaine de la micro finance véritable, les prêts et autres services financiers sont adaptés aux besoins et capacités de l'emprunteur. Ce n'est pas de l'argent rapide (« fast money »), c'est de l'argent lent (« slow money ») : de l'argent pour consolider la société, pour permettre à des individus d'échapper à la pauvreté. Les taux d'intérêt exorbitants, la multiplicité des prêts et l'exacerbation de la concurrence contribuent au surendettement des clients ; ils ternissent aussi la réputation du secteur et oublient les principes de base de son modèle. 

    D'un autre côté, les défis auxquels font face les acteurs de la micro finance - comme les taux d'intérêt sur les prêts - sont souvent traités sans véritable explication ou compréhension. S'attacher à réduire la pauvreté ne fait pas d'Oikocredit, par exemple, une œuvre caritative. Nous croyons fermement en une approche entrepreneuriale sociale et en des solutions financières adaptées. Les prêts sont plus efficaces que les subventions en termes de productivité économique et d'autonomie. Nous pensons aussi que nous devrions travailler avec des prêts bonifiés. Si une entreprise est viable au plan financier, les emprunts stimulent sa durabilité. À ce titre, nous savons que c'est grâce à la stabilité de des résultats financiers que la durabilité des organismes sérieux sera assurée et que leurs engagements envers leurs investisseurs tenus. 

    Il existe néanmoins une différence essentielle entre profit et maximisation du profit.

     

    Fixer un taux d'intérêt

    Toucher les zones rurales et accorder de petits prêts à des organisations petites et jeunes, souvent à risque : ceci a un prix. Les coûts de transaction élevés se traduisent parfois par des taux d'intérêts élevés. Il est essentiel que ces taux soient équitables et que le raisonnement qui les fonde soit transparent. Lorsqu'Oikocredit fixe un taux d'intérêts pour ses prêts, plusieurs facteurs sont pris en compte : le taux du marché, le coût du capital, les risques que présentent l'emprunteur et le pays, la cohérence en termes de développement et la couverture des coûts.

    En général, les prêts octroyés aux grandes institutions qui ont fait leurs preuves, surtout dans les pays à faible risque, bénéficient d'un taux d'environ 7 % (EUR) et de 8 % (USD). Les prêts aux plus petites IMF, sans grande expérience et situées dans des pays à risques, bénéficieraient de taux allant de 9 % (EUR) à 11 % (USD). Ces taux peuvent varier en fonction de l'évolution des taux de base et d'autres facteurs.  

    Les prêts effectués en devises locales s'accompagnent souvent d'un taux d'intérêt plus élevé que ceux en devises fortes, tenant compte d'une plus forte dévaluation (en partie influencée par l'inflation). Les IMF doivent aussi couvrir leur propre capital, les coûts opérationnels et les risques qui pèsent sur les taux d'intérêts de leurs prêts. Pour garantir des coûts raisonnables, Oikocredit évalue scrupuleusement la gouvernance et l'efficacité des partenaires via un processus poussé de sélection et de suivi régulier.

    Afin de garantir la complète transparence des taux d'intérêts et des coûts, Oikocredit a signé en 2008, l'Accord MFTransparency. Cet accord symbolise notre engagement à ouvrir la communication avec nos partenaires (IMF) afin de s'assurer que les coûts des services financiers aux individus pauvres sont transparents, clairs et équitables. 

     

    Responsable au plan social à chaque étape

    Chaque échelon doit faire preuve d'un comportement socialement responsable : investisseurs, institutions de micro finance, bénéficiaires. Afin d'appuyer la mise en place de pratiques et de politiques cohérentes pour l'ensemble de cette industrie, Oikocredit a été l'un des premiers des 35 signataires en faveur d'une nouvelle politique de protection de la clientèle. Cet outil garantit entre autres que les clients sont protégés du surendettement et qu'ils bénéficient d'une pleine transparence des prix et conditions.

    Si Oikocredit agit pour que ses partenaires de projet soient en mesure de rester à leur mission sociale, il est tout aussi important de s'assurer que ses actions sont en accord avec ses objectifs. L'innovation la plus récente en matière de mesure des performances sociales consiste à regarder au-delà de la performance des IMF et à évaluer les organismes financeurs tels qu'Oikocredit. En début d'année, Oikocredit était le premier financeur privé à se soumettre à un audit sur ses propres performances sociales.

    Quand un investisseur choisit Oikocredit, il choisit un investissement au revenu financier modeste mais à l'impact social élevé. Par exemple après presque 35 années de terrain, Oikocredit a prouvé que le modèle financier équitable fonctionnait. Il est possible de créer une organisation durable et rentable, exclusivement centrée sur la finance socialement responsable. Et nous allons continuer : continuer de renforcer activement le potentiel de la microfinance, continuer d'améliorer le sort des plus pauvres.

    (1) Par exemple en France la SIDI (Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement, crée en 1983 par le  CCFD ou Oikocrédit (d’origine protestante) , le plus ancien (35 ans) et plus gros organisme mondial de micro finance Nord/Sud .


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