• Comment réguler les migrations ?

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    1
    Pierre Marsal
    Mardi 17 Juillet 2012 à 09:22
    Ce n’est pas tant le texte que je souhaite commenter, texte tout à la fois précis et concis et qui répond bien à l’interrogation initiale. Mais il incite aussi à se poser des questions qui se situent bien en amont.

    D’abord celle-ci : avant de savoir « comment (réguler) », ne faudrait-il pas s’interroger sur le « pourquoi » ? Cela suppose au préalable qu’on définisse et qu’on prenne la mesure du phénomène, c’est-à-dire qu’on le quantifie. La définition du Larousse est insuffisante : qu’est-ce réellement qu’un migrant ? Les Européens de l’espace de Schengen en font-ils partie ? Quand perd-on le statut d’immigré ? par l’obtention de la nationalité du pays d’accueil ? Quid des enfants d’immigrés, réputés Français par leur naissance en France ? A défaut d’être au clair sur ces questions, on risque de se livrer à des controverses viciées. Certains avancent que la France compterait plus de 10 % d’immigrés : qu’en est-il en réalité ? On se doute que la question n’a la même portée selon la réponse donnée.

    Ce préalable étant posé, il reste à examiner ce problème sous plusieurs angles : économique, éthique, démographique, culturel, etc.

    D’un point de vue économique, certains affirment que le coût de l’immigration serait, pour l’Etat en France, supérieur aux recettes qu’elle génère : je crois avoir vu avancer un déficit légèrement supérieur à un point de PIB (source ?, rapport de la CdC peut-être, à vérifier). Dans une optique de budget de l’Etat c’est peut-être vraisemblable, mais ce n’est guère pertinent, car purement comptable et oublieux, par exemple, des effets induits par les dépenses faites au profit direct des immigrés (par exemple, prestations sociales en faveur d’une population à faibles revenus, ayant donc une forte propension à consommer). Sans compter les incidences économiques à plus long terme. Existe-t-il un vrai bilan économique de l’immigration ? Ce n’est certainement pas facile à établir. On peut donc concevoir qu’il s’agit là de questions ouvertes à vives controverses.
    Cela me donne d’autre part l’occasion de me gendarmer à nouveau contre le concept d’ultra-libéralisme : certes on s’efforce à éliminer tous les obstacles à la libéralisation des échanges (via l’OMC notamment) de biens, de services et de facteurs de production. Même – cela peut paraître paradoxal – pour un facteur aussi peu mobile que la terre : voir les achats de terres des Sud-Coréens à Madagascar, des grandes firmes européennes en Amérique du Sud. Seule la main d’œuvre est plus ou moins sévèrement contrôlée. Libéral ça ?

    D’un point de vue éthique, on retrouve sans trop d’étonnement les mêmes partages d’opinion que nous avons déjà rencontrés sur d’autres sujets dans ce Café Débats. Partage d’opinions difficilement conciliables entre ceux qui, si l’on se réfère à Max Weber en tiennent pour une éthique de la conviction, soucieuse de la dignité de tous les êtres, mais parfois oublieuse des conséquences qui en résultent, et les tenants d’une éthique de responsabilité, privilégiant, souvent de façon timorée et frileuse, l’éventualité de conséquences néfastes. Sommes-nous mûrs sur ces questions pour adopter enfin une éthique de la discussion (Habermas) où seraient opposés objectivement les finalités et leurs arguments ? Ce n’est pas évident, la question de l’immigration étant de celles qui déchaînent les passions. Ce Café Débat jouerait pleinement son rôle en étant justement un des lieux où peut se faire cette confrontation.

    Pour éviter d’être trop long, je ne cite que pour mémoire le point de vue démographique, en faisant mention par exemple de l’incidence positive d’une certaine immigration sur le taux de natalité et le point de vue culturel, en renvoyant notamment (puisque c’est d’actualité) à tout ce que nous a appris Claude Lévi-Strauss sur l’incomparable richesse de la diversité humaine. On pourrait aussi invoquer des arguments historiques (les effets passés, positifs ou négatifs, des « grandes invasions » ; l’apport des étrangers, illustres ou moins illustres, qui ont fait la France), géopolitiques (les mérites des melting-pots). Enfin dans un domaine où la métaphore n’est pas interdite, on peut avancer des arguments de toute nature : biologiques (bienfaits de l’hybridation), physiques (les effets mécaniques des différences de potentiels), etc. Les points de vue étant divers, il est naturel que les interprétations le soient. L’ennui est qu’ils sont souvent sous-tendus par des relents de xénophobie ou de racisme.

    Ces commentaires constituent peut-être une digression, mais, sur un sujet aussi sensible, je me méfie d’un discours qui serait seulement administratif et gestionnaire. Je ne voudrais pas faire de comparaison désobligeante, mais je ne peux pas m’empêcher à penser à l’affaire Papon (ce bon fonctionnaire !) ou au livre de Robert Merle (« La mort est mon métier »).

    Pour finir un petit « coup de gueule » en deux temps : 1) Qu’est-ce que c’est que cette civilisation où la dignité humaine, où la différence entre homme et untermensch, dépendent de l’obtention d’un chiffon de papier ? 2) Je n’ai rien contre l’actuel ministre chargé du dossier ; mais je note que ce sont souvent les transfuges de la gauche qui deviennent les pires extrémistes (Cf. Déat, Doriot ou Mussolini). Ça ne fait en rien avancer le débat, mais ça défoule !
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