• C.R. du 23 Nov.2019.Une opinion doit-elle toujours se fonder sur une connaissance ?

    Compte-rendu de la réunion du 23/11/2019 :

    Une opinion doit-elle toujours se fonder sur une connaissance ? 

     

    18 personnes étaient présentes à ce débat. 

    Signification des termes 

    Le sens des mots a été jugé très important, et la définition de l'opinion donnée dans le papier d'introduction, fondée sur la subjectivité, trop restrictive. D'autres déclinaisons ont été citées pour la compléter, sans vraiment les détailler : point de vue, jugement, avis, sentiment, intuition, conviction, croyance : 

    •  une opinion est quelque chose de personnel qui n'implique pas que ce qu'on pense est vrai, c'est d'abord un préjugé, 
    •  un avis résulte d'une réflexion, d'une délibération, d'un raisonnement, en vue de mener une action, 
    •  un sentiment est une connaissance plus ou moins claire et immédiate sur un sujet donné : « j'ai le sentiment que... ». C'est quelque chose proche de l'intuition 
    •  une opinion peut avoir une valeur heuristique, c'est à dire qu'elle se réduit à une hypothèse de travail qui doit être confirmée ; elle peut donc être vraie sans qu'on sache pourquoi. 

    Approfondissement de la notion d'opinion 

    Toutes les opinions ne sont pas de même nature. Par exemple, quand je dis : « Marie est une belle femme », c'est mon opinion, et elle est vraie pour moi, pas forcément pour les autres, elle ne s'appuie sur aucune connaissance. Il n'en va pas de même des opinions politiques ou religieuses, qui veulent souvent prouver leur véracité en s'appuyant sur des arguments qui ne sont pas des connaissances objectives. 

    Dans l'histoire, il y a de nombreux exemples où l'opinion générale, la « doxa », a changé quand les connaissances se sont accrues : l'apparition d'une supernova il y a 2000 ans a rendu caduque la croyance en la fixité de la sphère céleste, Galilée et la rotation de la Terre autour du soleil, les actions à distance pour expliquer la gravitation, l'hérédité par Mandel, Semmelweis pour l'asepsie et les microbes...Il y avait là une vision des choses qui donnait du sens aux observations. Ceux qui ont avancé ces hypothèses, au départ considérés comme des hérétiques dangereux, se sont opposés au dogmatisme de l'opinion majoritaire de l'époque, parfois au péril de leur vie, mais ont vu ensuite leurs opinions devenir réalité au travers de preuves les transformant en connaissances. 

    Ceci est également vrai de certains courants de pensée tels le marxisme léninisme, intéressant sur le plan des idées, mais piégé dans ses certitudes doctrinaires contraires au bon sens, l'amenant à ne pas tenir compte de la réalité vécue. 

    Il y a aussi des croyances qui perdurent contre toute rationalité, même quand des preuves les infirment : exemple de la corne de rhinocéros et de son effet supposé sur la virilité. Comment se dépouiller de cela pour faire admettre la vraie connaissance, pour éliminer les préjugés tenaces ? 

    L'articulation opinion / connaissance n'est pas simple à réaliser, car il n'y a généralement pas de solution unique à une question posée. Par exemple, lorsqu'un juge d'instruction instruit un dossier équitablement et expose les faits, les membres du jury amené à décider ont rarement tous la même appréciation. Il en va de même sur des sujets tels que les OGM ou le nucléaire, tout le monde n'a pas la même perception des faits, même quand ils sont énoncés de manière aussi pédagogique et impartiale que possible. 

    Confronter ses opinions avec celles d'autrui peut se révéler difficile si on n'a pas les mêmes références, car nous sommes tous imparfaits : soit on écoute réellement l'autre, avec bienveillance et ouverture, en essayant de garder le meilleur, soit on veut simplement le convaincre de sa propre opinion en rejetant la sienne. Cela peut aboutir à des blocages, à énoncer des jugements de valeur, à s'éloigner de la connaissance au lieu de s'en rapprocher. S'enrichir, c'est être tolérant et accepter la diversité des points de vue. 

    La connaissance par la science 

    Certains pensent que la science n'apporte pas forcément de connaissances définitives, puisqu'il y a toujours des exceptions qui infirment les lois qu'on dit générales : il y a des pratiques qui fonctionnent sans qu'on sache pourquoi, et qui dépendent du contexte. Pour appuyer ce point de vue, des exemples sont cités : 

    •  les théories physiques, qui sont remplacées par d'autres plus complètes ou différentes : Newton par la relativité, le darwinisme par d'autres hypothèses, la mémoire de l'eau qui n'aurait pas reçu d'explication, etc. Aucune théorie ne serait vraie, puisque chacune succède à une autre en la réfutant,
    •  les guérisons de maladies par des guérisseurs, par la simple volonté de retrouver la santé, par une alimentation saine, par l'effet placebo, etc. Sur ces sujets, il n'y a pas de connaissances fournies par la science, pourtant cela existe, et peut se fonder sur le fait que nous ne sommes pas des machines, nous avons un corps mais ausssi un esprit, pour lequel les explications ne peuvent être que psychiques. Ce n'est pas parce qu'on ne peut pas prouver quelque chose que cette chose n'existe pas, nous vivons dans un monde où trop d'attention est accordée à la démonstration scientifique, à la preuve. D'autre part, les médicaments ne marchent pas toujours, ont souvent des effets secondaires néfastes, et les vaccins sont parfois mortels, malgré la rigueur de leur conception. 

    La plupart des personnes présentes s'élèvent contre ce point de vue jugé sinon  « obscurantiste », du moins ignorant de la méthode scientifique, fondée notamment sur la reproductibilité des phénomènes. Une théorie est scientifique si elle est réfutable, et non le contraire. Toute connaissance qui se veut absolue n'est rien d'autre qu'une croyance. Certes, les physiciens ont aussi des opinions, émettent des hypothèses de travail pour avancer, mais la différence, c'est qu'ils essaient de les vérifier au travers d'expériences reproductibles. Il a été répété que, par nature, la science doute et cherche la vérité, la croyance l'a déjà trouvée et ne s'intéresse pas aux preuves. 

    Il est rappelé aussi que l'étude scientifique de phénomènes psychiques est possible, par exemple Boris Cyrulnik a étudié par IRM le fonctionnement du cerveau lorsque des croyants prient et lorsque des personnes méditent. 

    Même les sciences humaines, dites « molles », utilisent des méthodes scientifiques, généralement fondées sur des approches statistiques et les lois des grands nombres. Les résultats obtenus sont des corrélations entre paramètres, sans explication obligatoirement causales entre ceux-ci. 

    La science ne serait qu'une croyance rationnelle.aboutissant à des certitudes. 

    La science, depuis l'Antiquité, cherche des explications harmonieuses à ce qu'on observe dans le monde. Aujourd'hui, cette recherche d'harmonie est toujours jugée nécessaire dans les théories physiques (les « symétries »), mais ce n'est pas suffisant, car on sait que ce qui est harmonieux n'est pas forcément vrai. Une théorie scientifique doit d'abord être cohérente, mais il en va de même d'une opinion pour qu'elle soit crédible. 

    La connaissance ne s'acquiert pas seulement par la démonstration, ou la reproductibilité des expériences, mais aussi par l'approche pragmatique. Par exemple, l'effet placebo fonctionne très souvent, on le constate, même si on ne sait pas pourquoi. 

    La formation de l'opinion 

    Pour se forger sa propre opinion, il faudrait pouvoir réaliser l'analyse pondérée des faits, avant de les synthétiser. Mais l'accès aux sources fiables n'est pas aisé, on doit se méfier des médias, dont les sources sont toujours de seconde main, ou qui sont sous la coupe de ceux qui les possèdent. Néanmoins, dans les débats télévisés par exemple, même s'il y a  toujours les mêmes commentateurs porteurs d'une pensée dominante, des opinions variées peuvent s'exprimer, et de bons journalistes troublent souvent le jeu des politiques. 

    Les gens sont influençables, trop souvent on adopte le point de vue de celui qui parle le dernier, ou qui parle le mieux ou le plus fort. Ou encore nous sommes sommés, dans le milieu professionnel, d'adopter l'opinion du chef, qui n'a pas à se justifier, sous peine de rétorsion. 

    Une opinion se forge souvent instantanément, en négligeant les faits, surtout quand on est jeune. 

    Il n'est pas facile de se faire une opinion même quand on dispose des connaissances nécessaires. Il faut que cela soit cohérent avec notre système de valeurs et nos croyances  fondamentales. 

    Pour sensibiliser les gens, il faudrait pouvoir diffuser les informations pertinentes sur tous les sujets par des experts, plutôt que de se focaliser sur les goûts du public et les événements à sensation. 

    Opinions sur divers sujets 

    •  le tourisme : les opinions sont très variées. Il y a ceux qui voyagent beaucoup pour sentir l'histoire d'un pays, parce que « ça nous enrichit », jusqu'à ceux qui ne voyagent pas pour diminuer leur empreinte carbone. La plupart s'accordent cependant pour dire que ce qui justifie un voyage, c'est le désir de connaître intimement un pays et ses habitants ; pour cela il est nécessaire d'y être immergé pendant une durée suffisante, de partager la vie quotidienne (expatriation par exemple). Ce ne serait pas le cas des hordes de japonais et de chinois qui déferlent en France chaque année, sauf si on pense que c'est juste parce que leur culture les empêche d'être curieux. 
    • L'économie : cette science « molle » ne peut rien prévoir, car elle se fonde sur les comportements humains qui sont très souvent imprévisibles, peu reproductibles, inabordables par l'expérimentation ; au mieux, elle peut donner des « recettes ». Par contre, elle peut partiellement expliquer a posteriori ce qui s'est passé. Certains fondements semblent pourtant incontestables, telle que la loi de l'offre et de la demande. 
    •  L'alimentation : les opinions divergent sur l'importance de l'alimentation pour la santé des personnes. Une personne affirme que toutes les maladies proviennent d'une alimentation inadéquate et d'un système digestif insuffisamment bien traité ; d'autres font valoir que le corps est un système très complexe où un seul paramètre ne peut tout expliquer, sans nier l'importance d'une bonne alimentation. 

     

    Compte-rendu effectué par Jean-Jacques Vollmer d'après l'enregistrement du débat 


  • Commentaires

    1
    Dimanche 1er Décembre 2019 à 23:17

    On peut lire dans ce très bon compte-rendu:

    "•                     les théories physiques, qui sont remplacées par d'autres plus complètes ou différentes : Newton par la relativité, le darwinisme par d'autres hypothèses, la mémoire de l'eau qui n'aurait pas reçu d'explication, etc. Aucune théorie ne serait vraie, puisque chacune succède à une autre en la réfutant,"

    C'est en effet ce que pensent majoritairement nos contemporains: les théories physiques sont un peu comme la mode: elles passent, sans laisser de trace.

    Mettre la mémoire de l'eau, qui est une connerie avérée, et n'a jamais eu le moindre commencement de preuve (l'auteur de cette connerie, Mr Benveniste, a finalement été démis de son poste de directeur de laboratoire, avec interdiction de publier dans les revues scientifiques), la mettre à côté du Darwinisme, ou de la Physique de Newton, prouve une inculture scientifique crasseuse doublée d'une impudence caractéristique de certains ignorants, qu'on ne peut laisser passer sans réagir.

    La vérité est que certaines théories, vérifiées des milliards de milliards de fois, ne sont pas contestables; je pense à la Physique de Newton, à la relativité, restreinte ou pas, d'Einstein, au darwinisme, à la théorie  d'Archimède...

    Simplement, une fois de plus, il est présomptueux de penser qu'on n'ira jamais aller plus loin, que "circulez, y a rien à voir", on a déjà tout trouvé. Par exemple, la relativité d'Einstein ne détruit pas du tout la théorie de Newton, elle la compète pour les grandes vitesses, l'eau c'est H2O pour l'éternité, mais finalement il a été trouvé aussi une petite proportion d'eau "lourde" qui est HDO, etc...

    Donc, en conclusion et une fois pour toutes, ne disons pas qu'une théorie remplace l'autre pour les sciences dures comme la physique, la chimie, la biologie, les Mathématiques,..., mais disons qu'on peut toujours essayer de les compléter.

    Pour ce qui est de l'économie, par exemple, c'est différent, mais à proprement parler, ce n'est pas une science, en ce qu'elle est incapable de prévisions, seulement de post-visions, ce qui est déjà pas mal et très utile: une "crise économique" ne devrait jamais se reproduire, l'humanité peut, si elle le veut, apprendre de chaque crise..

     

     

    2
    Pierre M.
    Mardi 3 Décembre 2019 à 23:40

    Remarquable exposé et non moins remarquable CR qui font regretter de n’avoir pas été présent aux débats.

    Quelques observations et réactions dans le désordre.

    - L’opinion peut être fondée sur des faits réels, mais aussi sur des informations erronées (infox ou fake news) ou sur des manipulations d’informations avérées (post-vérité, production d’une ignorance stratégique : exemple des études du lobby du tabac).

    - La démarche de l’opinion est radicalement à l’opposé de la démarche scientifique rationnelle. Pour Alfred Sauvy (L'opinion publique, 1956) celle-ci "part du fait, de l'expérience et va vers l'action ou la décision à prendre, en passant par le raisonnement logique". Alors que l'opinion suit le chemin inverse et "part de la conclusion et remonte aux faits “nécessaires”. Il ne lui reste plus qu'à prouver que les faits sont bien ainsi, ce qui est toujours possible, par une sélection appropriée de nouvelles". Essayez par exemple de discuter avec un créationniste, il avancera toujours des faits indiscutables à l’appui de sa thèse.

    - L’opinion se fonde souvent sur la généralisation de faits isolés. Ma tante Adèle qui buvait beaucoup de lait, mon voisin Nestor qui était amateur de fromages, sont morts d’un cancer au pancréas. Donc le lait est toxique il ne faut pas en boire ni consommer de laitages. Dans cette logique un  piéton ne devrait jamais traverser une route puisque c’est mortel (plus de 500 par an).

    - Une théorie ne remplace pas une autre, elle la complète ? Voire. Peut-on dire que la chimie a complété l’alchimie (dont Newton était un grand adepte) ? La science ne se constitue pas toujours par accumulation, le plus souvent elle procède de révolutions (voir Thomas Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, 1962).

    - L’économie pas une science ? Ça c’est une opinion. Elle ne prévoit pas les crises ? La sismologie ne prévoit pas les tremblements de terre. Ce n’est pas une science ?

    - A propos de Jacques Benveniste, il convient de modérer son jugement. Ce fut un brillant scientifique, quasi nobélisable, conseiller d’un ministre de la Recherche, siégeant dans les plus hautes instances de la Recherche (CRST). Le tort qu’il a eu est de suivre une voie (dégranulation de leucocytes au contact d’un anticorps très dilué) qui lui semblait prometteuse, mais qui était contestable, au point qu’il fut suspecté d’avoir bidonné ses expériences. Plutôt que d’admettre qu’il avait pu faire erreur, il s’est entêté dans sa démarche. Facteur aggravant, ses expériences étaient sponsorisées par un gros laboratoire de médicaments homéopathiques. Aujourd’hui, à quelques exceptions notables près (le Nobel Luc Montagnier, un ignorant ?) personne ne croit sérieusement à ses travaux. Ce genre d’anicroches est courant en Science (p. ex. hier les soi-disant rayons N du brillant physicien René Blondlot, aujourd’hui Gilles-Eric Séralini qui a médiatisé des expériences douteuses pour prouver la toxicité d’un maïs génétiquement modifié).

     

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    3
    Mercredi 4 Décembre 2019 à 22:40

    Compléter ou remplacer une théorie, je ne sais trop. Par exemple, ce qui me pose question pour la relativité générale, c'est que l'équation synthétique relie deux classes de paramètres différents : d'un côté, il y a ceux de la mécanique newtonienne, les vitesses, positions, forces,  énergie, impulsion, et de l'autre ceux qui décrivent la géométrie de l'espace-temps déformé au voisinage des masses. Quelle est la "vraie" description de la réalité ? Y a t-il vraiment des forces qui font que les masses s'attirent, ou bien tout s'explique t-il par la géométrie, les forces étant remplacées par les déformations de l'espace-temps ? De plus, dans la mécanique newtonienne, les forces sont supposées agir à distance et instantanément, alors qu'une anomalie gravitationnelle se propage dans l'espace au maximum à la vitesse de la lumière (ondes gravitationnelles)

    Mais laissons cela qui est quand même assez loin de la discussion sur l'opinion. Les lois de la physique s'appliquent partout dans notre univers (jusqu'à preuve du contraire), que l'homme existe ou non, alors que l'opinion est une caractéristique de la pensée humaine et n'a pas de valeur universelle; J'apprécie en particulier la remarque d'Alfred Sauvy, car j'ai rencontré dans ma vie professionnelle des gens extraordinairement intelligents, qui, dès qu'on leur posait une question, donnaient immédiatement une réponse, même hors de leur champ d'expertise, et la discussion qui suivait (éventuellement...) consistait avant tout à justifier la réponse spontanée qu'ils avaient faite, par la recherche d'arguments ad hoc en oubliant ceux qui n'allaient pas dans le bon sens. On pourrait en dire autant de certains politiques actuels.

    Quand à la sismologie, elle n'est pas une science en soi, c'est une science applicative. Elle ne fait qu'appliquer les lois de la mécanique, de la propagation des ondes sonores dans un milieu spécifique en tenant compte des données fournies par la géologie. Ce n'est pas ce que fait l'économie, qui commence par inventer ses propres critères de travail, notamment certains axiomes farfelus, et qui bâtit ensuite des cathédrales mathématiques dont la valeur des résultats n'est pas plus grande que la valeur des hypothèses de départ. C'est une science humaine, c'est à dire qu'elle ne peut avoir la prétention de mettre en équation le comportement des gens, sauf à traiter des données statistiques aboutissant au mieux à des corrélations.

      • Jeudi 5 Décembre 2019 à 12:06

        A vrai dire, je ne suis pas un expert en relativité générale, mais je peux dire ce que je crois avoir compris.

        La gravité s'exerce par l'échange continu d'une particule fondamentale, le graviton, de même que  l'électromagnétisme s'exerce par l'échange continu de photons "virtuels" (mot qui en Anglais veut dire "qui disparaît rapidement"), c'est à dire émis par une particule et capté par la particule réceptrice, les deux particules pouvant d'ailleurs être aussi bien émetteur que récepteur. Ces particules échangées n'ont pas la masse au repos nulle qu"elles devraient avoir: elles ne sont pas sur leur "couche de masse"..

        Pour ce qui est de l'électromagnétisme, ces particules échangées peuvent aussi être des particules libres, les photons qui nous éclairent. Eh bien pour la gravitation, c'est pareil: il y a possibilité d'avoir des gravitons libres, c'est ce qu'on appelle des ondes gravitationnelles, qui sont beaucoup moins courantes que les photons, je pense que c'est lié à la très faible valeur de la constante C de gravitation, celle de F=C mm'/r2  (je ..

        Alors, le concept Newtonien de "force" est il valable malgré la description de la déformation de l'espace? Je dirais que oui: en électromagnétisme, il y a bien une force due au champ électromagnétique procédant par échange de photons virtuels. Pour ce qui est de la gravité, c'est la même chose, mais les choses se compliquent car la gravité, l'espace et le temps ont partie liée (tu sais que la masse inertielle, celle qu'on observe dans F=ma et la masse gravitationnelle; dans F=Cmm'/r2, sont identiques), alors que dans l'électromagnétisme, ou les intèractions faibles, la masse n'apparaît pas dans l'interaction elle même..

        En résumé, la notion de force persiste, mais la gravitation a cela d'étonnant que les "gravitons libres" déforment l'espace, ce qui par bonheur, permet d'en détecter quelques_uns, les plus costauds émis lorsque deux etoiles s'effondrent dans un trou noir..

        Pour ce qui est de la sismologie, tu as en partie raison à mon avis; je dirais que ce n'est pas encore une science: elle pourra se parer de ce titre quand elle saura prédire quand arrivent  les tremblement de terre. Tout de même, si elle ne sait pas quand il y aura un tremblement de terre, elle a bien repéré les endroits à risque, et elle sait pourquoi ils sont à risque (tectonique des plaques), mais ne serait-ce pas plutôt de la géologie?.

        Pour ce qui est de l'économie, nous sommes parfaitement d'accord..

    4
    charlotte
    Mercredi 4 Décembre 2019 à 23:18

    L'essentiel des propos tenus durant le débat a été remarquablement restitué dans le CR de Jean-jacques : chacun peut y retrouver sa réflexion parfois mieux exprimée ici qu'au cours de sa propre intervention devant le micro, ce qui est mon cas. 

    Puis-je revenir sur le chapitre du tourisme ? Ma question était : le tourisme est-il un moyen de communication, c'est à dire d'échange, entre les peuples (je ne parle pas de devises !) ? Je me suis souvent posé cette interrogation en voyant déferler hors des cars stationnés devant le château de Versailles, de longs fleuves de Chinois, de Japonais... moins de Russes, qui traversent, tel un courant au large de côtes, la foule des autochtones. Prenant des selfies devant le portrait de Louis XIV, face à un miroir  de la galerie des glaces, ils nous ignorent totalement, et nous ne connaîtrons jamais rien de l'opinion qu'ils se seront forgée de notre pays, de sa profonde personnalité, durant leur séjour ; sans doute ne serait-elle pas, si nous la connaissions,  très différente de celle qu'ils avaient avant de quitter leur pays. Une chose semble certaine : grâce à leur smartphone, ils ne se seront, eux, pas quittés de vue durant tout leur périple. Quant à nous, en regardant passer ces hordes de touristes, nous n'aurons rien appris que nous ne sachions déjà  de leur us et coutumes. Evidemment, nos vacanciers agissent de la même façon lorsqu'ils déambulent, le téléphone au  bout d'une canne télescopique et en troupeaux serrés, derrière le parapluie d'un guide, ou à travers les salles d'un musée. 

    L'échange espéré a donc toutes les allures d'un gros ratage. 

    Permettez-moi une anecdote qui contredit mon propos : un jour que je faisais visiter le château de Versailles à mes petits-enfants, un petit "Brexiteur", juché sur les épaules de son père, a pointé du doigt le portrait de Louis XIV et, se tordant de rire, il a fortement exprimé opinion  : " Oh, daddy, he does look silly that king !" Amusée, je fus obligée d'admettre que, dans son costume à fanfreluches,  notre Roi Soleil pouvait paraître ridicule ;  mais quel prof d'Histoire, quel guide, oserait nous "informer" de cela ?  Il fallait  toute l'audace de ce petit Anglais pour faire apparaître aux yeux de tous que… le roi était nu !!!  Nos opinions, nos goûts, nos jugements sont assez rarement remis en cause, car  nous manquons trop souvent de l'esprit critique dont nous a parlé Jean-Jacques.    (Ceci dit les chapeaux ultra kitch d'Elisabeth II nous interrogent  tout autant que les culottes bouffantes de Louis XIV)

    J'aimerais également revenir sur la notion de tolérance soulevée par l'intervention de Marc-Henri. La tolérance est une vertu et donc, comme toutes les vertus, elle demande un travail de générosité, un effort d'ouverture qu'il faut exercer sur soi-même malgré le réflexe de méfiance, de désapprobation que l'on peut avoir vis-à-vis de " l'étranger ". Si la réflexion de Marc-Henri est pleine de sagesse, il n'est cependant pas toujours nécessaire  de faire appel à la vertu lorsque nous avons la chance de rencontrer quelqu'un venu d'ailleurs, ou de nous exiler sur une terre inconnue. Laisser l'autre venir à soi, aller à sa rencontre est souvent une aventure heureuse qui laisse dans la mémoire un souvenir qui a embelli un moment de la vie.  Le navigateur et  philosophe Michel Serres ( comme je le regrette !) nous exhortait à quitter les chemins tout tracés : c'est dans l'errance disait-il, que l'on fait la découverte des autres et de soi-même ; alors on revient chez soi, poursuivait-il, couvert du manteau d'Arlequin aux mille couleurs.

    Petite mise en garde : Il ne faut pas non plus courir bras grands ouverts vers des peuplades dont nous ne connaissons rien des mœurs. Une approche prudente est signe de respect.

    Un exemple : 

    Durant le Second Empire, Victor Hugo convainquit - non sans mal - son ennemi juré Napoléon III de la nécessité de construire une voie ferrée qui traverserait d'Est  en Ouest le nord du Sahara. Cela partait d'une idée généreuse : il fallait aider les hommes du désert à parcourir leur territoire plus facilement qu'ils ne le faisaient à dos de dromadaire. Nous deviendrons amis. Les " hommes bleus du désert " avaient le cœur noble disait-on, ils étaient fiers, courageux et hospitaliers. Ce qui était vrai. Mais on ne peut, même avec les meilleures intentions, investir un territoire sans avertissement ni accord préalables  avec  pelles,  pioches, sondes et machines sophistiquées. 

    Ils partirent trente-neuf : ingénieurs, géologues, géomètres… afin d'étudier le sol et les possibilités du projet. L'un d'eux revint assez rapidement au pays, il avait eu les yeux brûlés par la réflexion de la lumière du soleil sur les lacs salés. Les autres, ne revinrent jamais ou dans un très mauvais état.

    Longtemps ils ont espéré faire la connaissance des Touaregs. Et puis après des jours et des jours de travail et de souffrance, passés dans une fournaise infernale, vint celui où ils virent arriver de très loin une ligne de Touaregs, formée en rangs serrés. Ils explosèrent de bonheur, poussant de joyeux cris d'appels et faisant de grands signes d'amitié.

    Quelques minutes plus tard, plus un seul n'avait encore la tête sur les épaules.

    Oui, je le disais plus haut et ma grand mère disait la même chose : prudence en vacances. (Je sais, mon commentaire est moins sérieux que ceux de Benoît et Pierre.)    

      • Jeudi 5 Décembre 2019 à 14:49

        Réponse courte sur le tourisme.

        Aller visiter un pays comporte deux possibilités:

        aller au devant des traditions de ce pays pour glaner de nouvelles émotions et connaissances, et comparer avec ses propres traditions;.

        aller au devant des personnes de ce pays , ce qui demande beaucoup plus de temps mais est formateur c'est sûr!.

        Les deux sont enrichissantes.

    5
    Pierre M.
    Vendredi 6 Décembre 2019 à 00:15

    Je m’insurge contre la conception réductrice – quasi sectaire oserais-je écrire -- de la science qui est professée ici. Ce qui est scientifique ce n’est pas le domaine sur lequel on s’investit, c’est la démarche qui est adoptée (pour se référer à Claude Bernard en matière de sciences expérimentales : observation des faits, émission d’hypothèses, vérification ou infirmation des hypothèses par retour aux faits). Cette démarche est valable dans n’importe quel champ d’application : de la physique nucléaire à la psychologie et – eh oui – à l’économie. La grande différence est sans doute due au fait que dans les sciences de l’homme et de la société (SHS), le nombre de paramètres (de « variables cachées ») est tel que l’on demeure dans le domaine de l’aléatoire et même de l’incertain. D’autant plus qu’il existe de nombreuses rétroactions qui perturbent l’observation.

     

    Va dire, Jean-Jacques, à un sismologue qu’il n’est pas scientifique ! La Loi d’Orientation et de Programmation de la Recherche (LOP) de 1982 distinguait de fait quatre grandes catégories de recherches, dont la Recherche Fondamentale (qui vous semble seule digne d’être qualifiée de Recherche) et les Recherches Appliquées et Finalisées. Il y en avait une trentaine dont : filière agro-alimentaire, matériaux, chimie fine, transports terrestres, textile, médicaments, instrumentation scientifique, etc. Pas de la recherche tout ça ?

     

    Sans être compétent en matière de physique théorique ça ne me gêne pas du tout de trouver dans une équation des paramètres ou des variables de nature différente. Ainsi ce que je trouve le plus génial en maths c’est l’identité d’Euler qui mêle en une courte formule cinq nombres de nature différente (e, i, pi, -1 et 0). ). C’est beau.

     

    J’étais bien plus gêné par cette fiction dont on nous bourrait le crâne au lycée : la représentation d’une force par une flèche qui partait d’un point fictif dans un objet et qui sortait de l’objet. Pratique je n’en doute pas, mais ridicule. Leibnitz d’ailleurs digérait mal cette force occulte newtonienne, qui isolait un élément dans un spatium unique.

    Tout ça parce que dans nos petites têtes d’occidentaux on peinait à appréhender la possibilité d’action à distance. Alors que la réalité ne réside pas dans le local, mais dans le global. C’est ce qui est beau dans la théorie de la relativité – et le génie d’Einstein --,  dans les théories des champs (à noter, si je ne me trompe, que ce n’est pas un Grand physicien mais un Grand laborantin, Faraday, qui a le plus fait pour l’émergence de cette théorie).

     

    Je réponds sur le blog puisque j’y réponds à des commentaires qui y sont publiés mais je me demande si des échanges aussi « pointus » y ont bien leur place.

      • Vendredi 6 Décembre 2019 à 14:17

        Réductrice, peur-être, car on ne fait jamais le tour complet des choses, mais sectaire ??? De quelle secte s'agirait-il donc ? Si je partage grandement ton opinion concernant la propension des français à vouloir tout ranger dans des cases pré-établies, cela n'a pas grand chose à voir avec ce que je dis de la sismologie. Cette science, c'en est bien une, je l'ai juste qualifiée "d'appliquée", C'est à dire qu'elle utilise les connaissances fondamentales de la mécanique des fluides, des solides, de la propagation des ondes sonores, pour apporter de nouvelles connaissances sur la structure de la croûte terrestre en utilisant aussi les données de la géologie. Et en appliquant à ses travaux la méthode scientifique. Je ne vois pas ce qu'il y a d'anormal ou de scandaleux à dire ça.

        Alors que pour l'économie, c'est autre chose. J'ai même lu quelque part, je crois que c'est dans "Alternatives économiques", que lorsque la réalité n'était pas conforme aux résultats du modèle, c'est la réalité qui avait tort. L'auteur voulait dire par là qu'il avait raison dans un monde idéal, où ses hypothèses seraient valables, notamment celle-ci : "si chaque agent économique connaissait à chaque instant l'ensemble des informations dont il a besoin, il trouverait la même chose que le modèle". Oui, peut-être, mais comme ce n'est pas le cas, ça sert à quoi de dire ça ?

      • Vendredi 6 Décembre 2019 à 16:57

        La grosse différence entre l'économie et les sciences dites exactes ne tient pas, selon moi, au nombre de vvariables, qui serai plus grand dans l'économie que dans, par exemple, la physique. La différence, selon moi, c'est que les êtres humains ne sont pas des molécules inertes, mais des humains imprévisibles par l'économiste.

        Que les économistes emploient la rigueur scientifique, c'est tout à leur honneur; mais à quand des prévisions fiables?.

        La post-vision des économistes ne doit pas être négligée. Un petit garçon qui met la main sur le poèle brulant, en général be recommence pas. Il semble que les politiques ne tiennent pas assez compte des expériences passées!

    6
    charlotte
    Vendredi 6 Décembre 2019 à 13:08

    Non Pierre ! 

    Les petites gens sont largués...

    7
    Pierre M.
    Vendredi 6 Décembre 2019 à 23:57

    Bon on ne va pas passer le Réveillon là-dessus.

     Le débat sur la scientificité de l’économie n’est pas nouveau, depuis le prestigieux  Malinvaud, un des pères de l’économétrie française, qui se réjouissait de constater –selon lui – que l’économie avait enfin atteint, de façon irréversible, le statut des sciences dures, c’est-à-dire de « s’installer dans le monde de l’objectivisme et des régularités calculables ».

     Mais, s’il en est ainsi, elle perd tout réalisme et finit par oublier l’objet sur lequel elle porte son regard. Cette critique que lui portent certains jeunes économistes (comme Thierry Pouch) rappelle la critique fondamentale que Husserl révélait dans sa critique de la science contemporaine (« La crise de la science européenne », 1935-36) : ce n’est pas la scientificité qui est en cause c’est la méthode pour y parvenir. Je n’insiste pas cela mènerait trop loin.

    Ne tombons pas dans le piège du nominalisme.

    Dans la réalité les scientifiques n’ont que faire de ces classifications. Surtout lorsqu’ils travaillent dans des équipes pluridisciplinaires comme c’est – heureusement -- de plus en plus fréquent. Imagine-t-on dans ces équipes des ségrégations entre super-scientifiques et sous-scientifiques !

    Je m’en tiendrai là.

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